Ainsi donc, certaines grandes surfaces seraient en pénurie de beurre. Ce serait la faute aux Chinois qui ont tout acheté ! Ce serait aussi la faute aux industriels, à de mauvaises récoltes et à une mauvaise politique de stockage. Et tout ça, on le savait depuis longtemps parce que les « experts » nous avaient alertés, mais personne n’a bougé.

Voilà quelques-unes des informations que tout un chacun a pu entendre ou lire ces derniers jours. Alors, info ou intox ? Un peu des deux, serait-on tenté de répondre, tant la situation est plus compliquée qu’il n’y paraît.

Oui, certains étals de grandes surfaces sont vides de plaquettes de beurre doux et demi-sel. Mais c’est plus un défaut d’approvisionnement qu’une pénurie de matière première car, dans le même temps, les rayons de lait ont été remplis et aucune pénurie de lait n’a été constatée. D’ailleurs, avec quoi fait-on du beurre ? En fait, dès que la rumeur sur le manque de beurre s’est propagée, les Français se sont rués sur les étals, surprenant les distributeurs, les industriels et les producteurs.

On veut aussi nous faire croire que les Chinois ont « piqué » tout le beurre destiné aux Européens, en particulier aux Français, premiers consommateurs de beurre (8 kg/an) devant l’Allemagne (6,2 kg) et les Tchèques (5 kg). Il est vrai que le marché asiatique a augmenté sa consommation car l’empire du Milieu s’est pris de passion pour nos viennoiseries. De même, les États-Uniens ont redécouvert les vertus du beurre, riche en vitamine A et en antioxydants. Les exportations de matière première s’en sont trouvées accrues et la production peine, aujourd’hui, à satisfaire la demande. Mais pas au point de désorganiser la production.

C’est pourquoi certains agriculteurs dénoncent aujourd’hui l’intox de la pénurie de beurre. Il n’y a pas péril en la demeure. Le 26 octobre, dans l’Ille-et-Vilaine et dans la Sarthe, les paysans ont distribué aux clients des supermarchés des tracts « Intox, la pénurie de beurre n’existe pas » dans lesquels est écrit, entre autres choses : "Si ce rayon est vide, c’est que ce magasin ne veut pas payer le beurre à son juste prix." Ce qui est en partie vrai. En effet, l’année 2017 est une année difficile pour l’agriculture française et mondiale, en raison de conditions climatiques capricieuses. La production de céréales fourragères, notamment à destination du bétail laitier, s’en est trouvée réduite, entraînant une baisse de la production laitière. En France, on enregistre une baisse de 3 % de la production de beurre, soit 700.000 tonnes en moins, selon FranceAgriMer. Le prix du lait aurait dû grimper à la production. Or, il n’en a rien été. En tout cas, les agriculteurs n’ont pas touché un centime de plus : le litre de lait se négocie toujours autour de 30 centimes et il arrive même que certaines coopératives agricoles, à la tête desquelles sont des agriculteurs, emploient des méthodes dignes des industriels privés…

En fait, depuis la fin des quotas laitiers, rien ne tourne plus vraiment rond sur le marché français. Et le lait tourné, ce n’est jamais bon à avaler. Les producteurs le savent mieux que n’importe qui.

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28 octobre 2017 à 23:05

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