Paris au mois d’août sous l’occupation du Covid-19

Capture d'écran
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Ça y est, nous y sommes : à compter de ce lundi 10 août, se promener dans Paris va prendre un air de carnaval pour une durée d’un mois – c’est sans doute qu'un début. Il y aura les zones masquées et les zones non masquées, et ce, en fonction de la fréquentation, nous explique la préfecture de police dans un communiqué.

Les zones masquées sont tracées en rouge sur la carte fournie en annexe de l’arrêté, pris « en pleine concertation avec la maire de Paris ». Dommage. On aurait pu imaginer des arrêtés différents avec des zones différentes et des couleurs différentes : c’eût été bien plus rigolo, mais non. Ils ont fait ça en concertation. Que les amoureux de Paris au mois d’août se rassurent, le rouge ne fait pas tache d’huile et se contente de quelques traits, ici et là, jetés sur la carte de façon très artistique mais néanmoins scientifique.

En essayant de déchiffrer cette carte, qui tient plus de la carte d’état-major que du guide Michelin, on arrive bien à deviner que les quais de Seine sont rouges ; en revanche, on a du mal à identifier les rues et boulevards marqués de la couleur d'infamie. On imagine donc qu’en entrée de zone rouge, des panneaux, voire des check-points, tant qu'à faire, seront installés. Des chevaux de frise comme à la belle époque de Berlin seraient d’ailleurs du meilleur effet. La traversée de Paris à pied, avec ou sans cochon dans sa valise en carton, va prendre un air de jeu de piste ou de jeu de loi - à 135 euros – des plus divertissants.

D’autant que l’arrêté précise bien que « cette cartographie fera l’objet d’une évaluation régulière et est susceptible d’évoluer dans les prochaines semaines en fonction des données épidémiologiques et de l’observation de la fréquentation au sein de l’espace public parisien ». En clair, ça peut bouger à tout moment. C’est ce qui fera le charme, d’ailleurs. Vous habitez en zone non rouge, un beau matin, vous descendez promener le chien et voilà-t-y pas que c’est passé en rouge dans la nuit. Le combat en zone urbaine est plein d’imprévus, vous savez. D’un pâté de maisons l’autre, la situation tactique peut être complètement différente. Et du jour au lendemain. Non, franchement, ça va être passionnant. Bon, je dis ça, mais comme j’ai pas prévu de « monter à Paris » dans les prochaines semaines, au fond, je m’en fiche un peu.

Paris au mois d’août ! Un film de Granier-Deferre, sorti en 1966, avec Charles Aznavour qui chantait, on l’aura deviné, « Paris au mois d’août ». À ne pas confondre avec « J’aime Paris au mois de mai », du même Charles Aznavour. Paris au mois d’août, donc : l’histoire d’un homme qui reste à Paris au mois d’août – jusque-là, c’est normal – pendant que sa petite famille est en vacances. L’homme, Charles Aznavour, rencontre une jeune femme, la ravissante Susan Hampshire, et il envoie tout balader, pour la durée du mois d’août. À la fin des vacances, tout rentrera dans l’ordre. Banal, tout ça. Ringard, même. On dit daté, aujourd'hui.

Un film relatant la traversée de Paris sous l’occupation du Covid-19, masque et gel hydroalcoolique dans un petit sac à dos Décathlon, est sans doute en train de s’écrire dans le Luberon ou sur l'île de Ré. Une comédie gentillette pour passer la soirée du dimanche sans se prendre la tête ou un drame social sur fond de discriminations : au choix. Paraît que dans le film de Granier-Deferre, il y a une scène d’amour d’autant plus torride qu’on ne voit rien. Dans le futur chef-d’œuvre, on montrera tout. Tout. Sauf, évidemment, le visage des comparses qui seront masqués.

Georges Michel
Georges Michel
Editorialiste à BV, colonel (ER)

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