Notre culture, responsable des féminicides ? Osez le féminisme ! ose le grand n’importe quoi

©Capture decran BFMTV
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Elle a pour prénom celui d’une héroïne de Claudel, mais c’est avec des gros sabots plutôt qu’un soulier de satin que cette porte-parole d’Osez le féminisme ! s’est exprimée sur deux récents meurtres de femmes par leur ex-conjoint, l’un à Bordeaux, l’autre à Amiens. Sur un ton monocorde de fillette récitant une leçon maintes fois répétée, Violaine de Filippis l'a affirmé : « C'est notre culture judéo-chrétienne qui engendre [ces féminicides] » : « Malgré ce que tente parfois de faire croire l’extrême droite, ce n’est pas dû à l’immigration, c’est bien notre culture, nos valeurs, notre éducation, celle qu’on donne à nos enfants, qui dans un continuum de violences créent ces drames » (sic). Notons tout d’abord que la journaliste de BFM TV - censée « tenir l’antenne », comme on dit quand on veut que l’Arcom tape sur les doigts de CNews, et recadrer ses invités quand ils dérapent sans donner le début de commencement d’une preuve - n’a pas fait l’ombre d’une objection sur ce point. Personne pour lui glisser que les femmes de « culture judéo-chrétienne » candidates à l’immigration en Afghanistan, au Pakistan ou en Arabie saoudite pour y goûter les joies de la condition féminine sous la bienveillante férule de la charia ne se bousculent pas, bizarrement, au portillon. Ou encore que, de deux discours, il faut choisir l’un : quand l’association Osez le féminisme ! a fait, en juin 2019, l’opération « Osez le clito », dénonçant la quinzaine de pays pratiquant encore l’excision, elle a implicitement reconnu que la pratique n’était pas issue « de l’Aveyron depuis le baptême de Clovis », selon l’expression savoureuse, sur Twitter de Joseph Thouvenel (directeur de la rédaction de Capital social).

Car si, sur le plateau de BFM TV, la saillie n’a rencontré aucune contradiction, à l’extérieur, d’autres, heureusement, à l'instar de Joseph Thouvenel, se sont chargés de remettre l’église au milieu du village et les points sur les i de Violaine de Filippis. La journaliste Eugénie Bastié a posté sur Twitter un célèbre tableau de Nicolas Poussin, La Femme adultère, avec ce commentaire lapidaire, c’est le cas de le dire : « Le Christ interdisant un féminicide » (Jean 8-1-11). Dans Le Figaro, son confrère Hugues Maillot a rappelé, chiffres de l’ONU à l’appui, que si un continent est sûr pour les femmes, c’est bien l’Europe, arrivant loin devant l’Asie, l’Afrique et l’Amérique. 

Mais est-il besoin de prouver l’évidence ? 

On pourrait en rester là et recommander à BFM TV de mieux choisir à l’avenir ses intervenants ou, a minima, de ne pas les laisser en roue libre : Violaine de Filippis, en plus d’être avocat et porte-parole de Osez le féminisme !, est aussi chroniqueuse régulière pour L’Humanité, et il suffisait de jeter un œil sur ses billets pour se faire une idée de sa subtilité et de son sens de la nuance. Prenons, au hasard, celle datée du 21 décembre : « Comme tout système d’oppression, le patriarcat a ses fêtes et ses moments de communion, ses rassemblements positifs et joyeux. Le jour de Noël en est un magnifique exemple. Fête chrétienne, fête commerciale, fête de la famille, fête des enfants et, pour toutes ces raisons, fête patriarcale. » Fermez le ban. 

Sauf que Violaine de Filippis ne parlait pas qu'en son nom propre. Et l’association Osez le féminisme ! n’a pas fait la moindre mise au point après les propos de sa porte-parole. Force est d'en déduire qu'elle n'a rien à redire à cette déclaration et adhère à cette analyse du féminicide. 

Soutenue et subventionnée par la région Île-de-France, par la mairie de Paris, par le ministère de l’Éducation et de la Jeunesse ou encore par le Secrétariat d’État chargé de l’galité entre les femmes et les hommes, Osez le féminisme ! - c’est précisé sur son site - intervient dans les collèges et les lycées gratuitement grâce à la générosité de la mairie de Paris et de la région Île-de-France. Et parce que l’enseignement supérieur n’est jamais en reste, Violaine de Filippis en personne a été invitée, le 8 mars dernier, à la Sorbonne dans le cadre d’une conférence intitulée « Où en sommes-nous dans l'application réelle des droits des femmes en 2022 ? » 

Voilà donc à quoi, à notre insu, nos enfants sont biberonnés. On remercierait presque le député LFI Louis Boyard de bloquer lycées et universités pour la Journée de la femme. 

Gabrielle Cluzel
Gabrielle Cluzel
Directrice de la rédaction de BV, éditorialiste

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