Un ami candidat aux municipales me confiait, lors de la préparation des alliances et des listes : « Il faut susciter du désir ou de la peur. Et les deux, c'est encore mieux ! » Stratégie de gagnant.

Oui, mais voilà : que faire quand on ne suscite plus, vraiment plus, ni désir ni peur ? Autrement dit, quand on est un maire sortant LR ou PS. À Toulouse, le maire sortant LR a vite fait ses comptes : alliance avec LREM. Et qu'importe ce que disait Christian Jacob il y a un mois !

Bien des maires sortants ou des candidats PS ont fait le même calcul. La situation est exactement identique que chez LR : le leader parisien, Olivier Faure, répète que le parti est dans l'opposition à Emmanuel Macron mais, à l'échelon municipal, on dialogue, on s'allie, on se soutient joyeusement entre ex ou nouveaux petits camarades PS et LREM. Christian Jacob et Olivier Faure sont bien partis pour accéder à la finale du meilleur bobard de bronze.

Le Monde nous apprend en effet que, dans de nombreuses villes, PS et LREM partiront ensemble aux municipales : Clichy-sous-Bois, Romainville (Seine-Saint-Denis), Bergerac (Dordogne), Le Creusot (Saône-et-Loire), Bourg-lès-Valence (Drôme), Grenoble et quelques autres.

Le PS pense ainsi sauver ce qui lui reste de forces visibles : des étiquettes au fronton des mairies. Mais la démarche va lui enlever le peu de crédibilité qui lui restait. Le PS est en train d'inventer le « socialisme municipal » : lui qui, pendant des décennies, a maintenu artificiellement en vie le Parti communiste sous la forme du communisme municipal alors que le parti ne pesait plus que 2 % est en train de subir le même sort. Il devrait y réfléchir...

Surtout qu'il n'est pas assuré que LREM et Emmanuel Macron éveillent le désir et la peur dont me parlait cet ami. Il est même possible qu'avec la chute de la maison Bayrou, ces jours-ci, dans les bureaux d'un juge d'instruction, on assiste, dans un avenir plus ou moins proche, à celle de la maison Macron. Et alors, que deviendront-ils, nos amis LR et PS qui n'avaient rien trouvé de mieux que d'aller s'abriter dans cette maison de paille ?

Mais j'anticipe.

Pour le moment, cette course à la soupe LREM ne peut que ravir le parti d'Emmanuel Macron : c'est « la poutre qui bouge encore » d'Édouard Philippe, la poursuite de la recomposition. Au soir des municipales, avec les petits arrangements ici et là, chacun des trois compères PS, LR et LREM pourra exprimer sa satisfaction : il leur restera à chacun quelques dizaines de villes. Tout le monde aura gagné.

Tout le monde, sauf la démocratie et la clarté.

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06 novembre 2019 à 9:13

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