Vous faites donc un « journal de merde ». Ce n’est pas moi qui le dis, mais la très délicate « Valérie T* », petit nom de couloir de la compagne officielle de Moi-Président, dont le langage fleuri ne fait qu’ajouter la vulgarité à l’imposture.
Il se trouve que je suis abonné depuis toujours à votre journal de merde. Ces insultes résonnent donc aussi à mes oreilles et, j’en suis sûr, aux oreilles de chacun de vos lecteurs.
N’oublions pas que « Valérie T* » n’est pas la « Première Dame » de France mais la « deuxième compagne » de son président. Pour l'instant. Cela ne lui accorde aucun droit, si ce n’est celui de se taire et de s’effacer, officiellement s’entend. Se serait-elle contentée de passer ses nuits et quelques parenthèses privées avec Moi-Président, probablement aurait-elle gagné, vis-à-vis de la plupart des Français, un semblant de reconnaissance proportionnel à sa retenue et à sa discrétion. Que nenni ! La voici qui exige d’exister... en nous faisant payer, en prime, le prix de son effraction. Car elle parle (sur les élections, sur le mariage pour tous... piétinant au passage l’obligation de neutralité que lui confère sa carte de presse). Pire encore, elle dépense l’argent des contribuables : pour ses frais de déplacement, pour son secrétariat qui n’a de « privé » que le nom, pour la surveillance de ses proches, pour faire bâtir sa propre page Internet sur le site officiel de l’Élysée. On croit rêver ! En matière de vie privée, Mitterrand volait la France en cachette. Hollande, lui, le fait au grand jour.
Que dit la Cour des Comptes ? Que fait la justice ? Quelques téméraires ont bien essayé de sonner l’alarme en bravant la peur du harcèlement administratif et du contrôle fiscal. Une plainte a même été déposée pour « détournement de fonds publics » par la « maîtresse » de Moi-Président (elle est pourtant divorcée mais son nouveau couple — ils ne sont pas pacsés — n’a effectivement aucune existence juridique). Étrangement, je n’en ai pas trouvé le moindre écho dans vos lignes, ni même entre les lignes. Courage fuyons ? C’est, hélas, le deuxième problème : « Valérie T* » n’est pas qu’une imposture pour la République, elle est aussi un danger pour Paris Match...
Quel crédit accorder à celle qui a tellement « suivi » la gauche qu’elle a fini par la rattraper ? Quel jugement porter sur ce journalisme étrange qui s’arrêterait, selon l’expression consacrée, « à la porte de la chambre à coucher » mais où la journaliste, elle, serait invitée à pousser la porte ? Quelle justification trouver à cette « reconversion-promotion » en chroniqueuse littéraire aussi soudaine qu’incongrue (au nom de quelles compétences ? Pourquoi elle ?), avec signature en gros caractères, portrait en majesté et tout le tralala ? Que penser de celle qui cumule aujourd’hui les avantages de deux emplois en violant les règles de déontologie de chacun d’entre-eux (la discrétion d’un côté, la neutralité de l’autre) ?
En attendant, la schizophrénie non assumée de la Dame déteint lentement sur votre journal. Après tout, à quoi sert-il d’envoyer vos reporters, au risque de leur vie, chercher au bout du monde des informations qui, souvent, n’intéressent pas grand monde, si c’est pour négliger des informations « domestiques » que vous avez la chance d’avoir sous la main et qui, pour une fois, intéresseraient aussi bien ma dentiste, mon coiffeur que ma voisine psychanalyste ? C’est tout le risque d’un « journalisme myope » qui manierait très habilement la longue vue et très mal la loupe.
Car nous aimerions savoir.
Quand nous révèlerez-vous donc en « exclusivité » ses coups de griffe et ses coups de gueule? Tout ce que l’on sait et que l’on tait ? Comment empêche-t-elle sa propre consœur de monter dans l’avion de Moi-Président ou pourquoi menace-t-elle, paraît-il, de ne « plus faire de papier avec le groupe » ? Pourquoi poursuit-elle tous les journaux (sauf Paris-Match) lorsqu’ils publient des photos d’elle en maillot ? Pourquoi, au contraire, punit-elle Paris-Match lorsque vous publiez une photo anodine, main dans la main avec Moi-Président ? À quand la grande enquête collective et « exclusive », « de nos envoyés spéciaux à Levallois-Perret » sur le thème : « Qui est vraiment Valérie T* » ?
La situation est-elle tellement inextricable ? Pas sûr. Pour rassurer en même temps lecteurs et électeurs, votre collaboratrice pourrait prendre un congé sabbatique sans solde, comme le font tous ses confrères sérieux dans des situations similaires. Et pour ne priver personne, entre temps, de son indispensable rubrique, vous pourriez par exemple — l’idée m’en vient à l’instant — remplacer « Le regard de Valérie T* » par « Le regard de Christophe L* ». Figurez-vous qu’en plus de mes nombreuses occupations bénévoles, je suis prêt, moi aussi, à faire don de ma personne à la chronique littéraire. Professionnel de la « carte blanche », spécialiste de pas grand-chose, j’ai donc toutes les compétences pour parler avec conviction d’à-peu près n’importe quoi. Je le ferai, soyez-en sûr, avec une naïveté bien affûtée et l’enthousiasme sincère de tous ceux qui débutent dans un nouveau job.
Sans compter que votre vie changera du jour au lendemain. « Valérie T* » ne passe plus au journal ? Je vous promets d’y venir régulièrement. Elle vous coûte cher ? Je me contenterai d’une partie de son salaire et vous n’aurez même pas à me tirer le portrait : j’ai déjà la photo qui va bien, la main sous le menton, le regard profond et pénétré. Les problèmes déontologiques ? Ils ne seront plus qu’un mauvais souvenir. Les insultes permanentes ? Ce n’est pas le genre de la maison : j’ai toujours préféré les traits d’humour aux coups de gueule. Je m’engage même solennellement ici, par écrit, à ne jamais laisser d’insulte sur votre répondeur. Bref, le changement, c’est maintenant.
Chiche ?
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