Une ville côtière dans le Rif marocain, Al Hoceïma, 55.000 habitants.
Mohcine Fikri, 30 ans, a passé sa journée à pêcher, il rentre chez lui avec un panier plein d’espadons ; il s’agit d’une espèce protégée.
Mais il est intercepté par une patrouille de police, qui saisit sa marchandise et la jette dans une benne à ordures. Mohcine s’oppose tout d’abord à la destruction de sa pêche, puis se précipite pour tenter de la récupérer. Quelqu’un (un policier, selon certains témoignages) met volontairement en marche la benne de ramassage d’ordures. Mohcine Fikri est broyé vivant.
Un téléphone portable a filmé cette scène abominable. La tête et un bras de la victime dépassant le mécanisme de broyage de la benne. Diffusée sur Internet, puis sur les réseaux sociaux, cette scène macabre a provoqué une colère immédiate dans tout le pays.
Au Maroc, il est vrai que la police a « presque » tous les droits, alors qu’en France les policiers doivent se faire tuer… avant de pouvoir tirer.
Des milliers de personnes ont assisté, dimanche, aux funérailles de Mohcine et l’ont accompagné jusqu’à la localité d’Imzouren, où il a été inhumé.
Des manifestations se sont déroulées aussi bien à Casablanca qu’à Rabat ou Marrakech.
Drapeaux berbères en tête des cortèges et des slogans scandant "Criminels, assassins, terroristes", "Nous sommes tous Mohcine" ou encore "Écoute makhzen (Palais royal) on n’humilie pas le peuple du Rif" et, enfin, "Bienvenue à la COP22 : ici, on “broie” les gens" (dans une semaine s’ouvre, à Marrakech, la conférence internationale sur le climat, la COP22, dont Rabat souhaite faire une vitrine internationale).
Le roi Mohammed VI, actuellement en déplacement en Tanzanie (Afrique de l’Est), a dépêché le ministre de l’Intérieur, Mohamed Hassad, afin de présenter les condoléances du souverain à la famille de la victime et l'assurer de sa compassion, et donné des instructions pour qu’une enquête soit diligentée afin que les responsables soient punis sévèrement (nous connaissons parfaitement ces déclarations d’usage, en France aussi).
Souvenons-nous que le « printemps arabe » a débuté à Tunis, en 2010, parce qu’un jeune vendeur ambulant, Bouazizi, s’était immolé par le feu afin de protester contre la saisie de sa marchandise !
Et que cette ville côtière du Rif, Al Hoceïma, fut à l’origine d’une insurrection populaire en 1958 et l’un des principaux foyers de contestation lors de la version marocaine de ce « printemps arabe » en 2011.
Mais si « débarquer » un président semble possible en Tunisie, un roi, au Maroc, cela paraît impensable… alors qu’en France, on le décapite !
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