À l’école de la République où j’allais, des maîtres m’enseignèrent que les Gaulois étaient nos ancêtres, fait d’autant plus incontestable qu’il était confirmé par le nom du monarque qui régnait alors sur la France ! Les images du livre d’histoire étaient belles, malgré les taches d’encre violette laissées par les écoliers des années passées. Elles donnaient envie d’apprendre et d’aimer la France. J’imagine que, pour obtenir ce résultat, nos « apprenants » n’avaient pas ingurgité des projets pédagogiques filandreux. Plus tard, je lus L’Identité de la France de Fernand Braudel et je compris que, si ce que m’avaient enseigné mes instituteurs n’était pas faux, les choses étaient tout de même plus compliquées.
Ces images nostalgiques me reviennent en contrepoint de ce que je lis dans la page consacrée au thème nation-intégration sur le site du Parti socialiste et ce, dans le cadre de ces fameux états généraux des socialistes. Une historienne qui prendra sans doute place à la suite des plus grands, Marylise Lebranchu, accessoirement ministre, écrit avec la certitude de celle qui détient la vérité : "La nation française s'est construite par et grâce à l’immigration : au fil des siècles, elle s’est enrichie de l’apport extérieur que représentaient les arrivées successives de populations immigrées."
Notre historienne aurait écrit "la nation française s’est en partie construite par l’immigration", la chose était discutable (au sens que l’on peut en discuter) et recélait évidemment sa part de vérité. Alors, comment expliquer une phrase si réductrice ? Soit Mme Lebranchu ne sait pas écrire ou a tapé trop vite sur son clavier - j’en doute. Soit sa connaissance de notre histoire est bien sommaire - je n’en sais rien. Soit, enfin, elle lit notre histoire à travers le prisme idéologique. On ne m’enlèvera pas de l’esprit que cette explication est la bonne. Le "par et grâce" quelque peu insistant est sans ambiguïté.
Écrire que "la nation française s’est construite par et grâce à l’immigration", même et peut-être surtout dans le cadre d’un débat "nation-intégration", consiste tout bonnement à faire passer du côté de la face obscure notre roman national. Je n’irai pas jusqu’à évoquer les quarante rois qui ont fait la France : je ne veux pas provoquer tous ceux dont le disque dur n’enregistre qu’à partir de 1789. Cependant, j’ai quand même envie de dire au ministre et à tous ces jargonneurs du « faire société » que la nation française s’est d’abord construite grâce au labeur patient d’une chaîne ininterrompue de générations installées sur cette terre bien avant que l’immigration ne devienne, selon le dogme établi, une chance.
La nation française s’est construite aussi grâce aux sacrifices de ses soldats sur les champs de bataille. J’ai beau lire des pages et des pages de posts sur le site du Parti socialiste, rien sur ces contributions décisives à la construction de notre nation. Il me semble pourtant que l’intégration passe d’abord par l’appropriation du roman national que l’on devrait se garder de falsifier.
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