Le procès dit « de la BAC Nord » de Marseille débutait ce lundi 12 avril. 18 ex-policiers de la brigade anticriminalité de Marseille comparaissent devant le tribunal correctionnel de Marseille. Réaction et explications de Michel Thooris.

 

 

À Marseille, 18 ex-policiers de la BAC Nord sont devant la Justice. Que leur reproche-t-on ?

Rien de très précis. La BAC Nord de Marseille était très sollicitée pour obtenir du chiffre, notamment en matière de lutte contre la criminalité et les stupéfiants. Les collègues se sont mis en faute par rapport aux règles de procédure et d’enquête, avec la rémunération d’indicateurs via du numéraire saisi sans déclaration et du reversement de stupéfiants à ces mêmes informateurs. On leur reproche de ne pas être restés dans le cadre légal pour obtenir ces bons résultats. Il faut savoir maintenant s’il y a eu de l’enrichissement personnel ; à ce stade, il n’est pas démontré. On est plus dans un procès fait aux méthodes de la police, alors qu’on a retiré à la police nationale tous ses moyens d’investigation. La Cour européenne et le droit français, aujourd’hui, empêchent nos collègues d’utiliser correctement les indics. On a détruit la police du tonton, de l’indic.

 

L’un des avocats dit que son client est le bouc émissaire d’une guerre des chefs et d’un règlement de comptes politique. Est-ce courant que le policier soit un fusible ?

Dès lors que vous obtenez de bons chiffres et que vous servez aux politiciens des résultats qui leur permettent de remplir les urnes au moment des élections, en matière de lutte contre la criminalité et les stupéfiants, si les méthodes sont borderline, tant qu’on n’est pas vu pas pris, tout va bien. Le jour où ça sort, personne ne veut assumer. On a connu cette situation au moment des gilets jaunes, lorsque les collègues ont dû être très répressifs et qu’il y a eu des blessés : les policiers sont lâchés par les donneurs d’ordres et seuls face à la Justice.

 

À Grigny ou à Étampes, le week-end dernier, des policiers ont été pris à partie. Finalement il n’y a pas d’évolution…

Ils auraient tort de se priver, puisque aujourd’hui, si on essaye de tuer un policier, on ne risque rien après. Pourquoi s’arrêteraient-ils ? En France, dans certains quartiers, on en est au niveau de sécurité de certaines villes du Mexique comme Tijuana. Le jour où les politiciens et les Français se réveilleront, ils verront l’ampleur du cataclysme sécuritaire que nous vivons sur le territoire national. Malheureusement, ce sera trop tard. Pour régler des situations où les gangs ont totalement pris le contrôle des quartiers et où des réseaux mafieux ont infiltré les réseaux politiques au niveau local et les marchés publics, à un certain moment, ce sera trop tard pour reprendre le contrôle sécuritaire de notre pays.

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12 avril 2021 à 21:24

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