Macron chez Brut : plus communautariste que jamais

Capture d'écran
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L’interview d’Emmanuel Macron à Brut fera date. Comme on dit, et sans mauvais jeu de mots, ce fut du brutal. À moins d’un an du début de la campagne présidentielle, on ne peut d'ailleurs que recommander l’écoute de cet entretien, notamment pour tous ceux qui, à droite, sont frappés de strabisme macronien. Pour la faire courte, Emmanuel Macron entérine le fait qu’une société multiculturelle s’installe en France et il se fait le gentil accompagnateur de ce mouvement.

On avait déjà bien compris que le grand remplacement du mot « communautarisme » par « séparatisme » n’était pas une coquetterie sémantique. N’était-ce pas, en quelque sorte, laisser la porte ouverte à la reconnaissance, un jour ou l’autre, de communautés dans une République pourtant constitutionnellement indivisible ? Constitution qui reconnaît l’égalité de tous les citoyens (les citoyens, pas les autres, stricto sensu) sans distinction d’origine, de race ou de religion.

Or, que nous dit le président de la République, garant des institutions, durant cette interview ? « Il y a toute une part de notre Histoire qui parle à une jeunesse qui est noire ou maghrébine, et ils sont nos héros. Simplement, on ne les a pas reconnus, on ne leur a pas donné une place. » Et cette jeunesse ayant des origines asiatiques, « polak » ou « rital », etc., elle n’a pas droit à ses héros, elle aussi ? Pourquoi, donc, cette fixation présidentielle sur cette jeunesse noire et maghrébine ? L’approche des élections, peut-être ?

Alors, que propose Emmanuel Macron pour réparer cette injustice ? « J’aimerais qu’il y ait une forme d’appel à la contribution collective. Et qu’on ait 300 à 500 noms et qu’on ait ce catalogue d’ici mars et qu’on en fasse des noms, des statues… » Tout cela sous la houlette d’historiens. Lesquels, d’ailleurs ? On imagine qu’il va nous faire une convention citoyenne sur le sujet. Ça occupera durant les longues soirées d’hiver et permettra de faire campagne à pas cher, notamment dans les quartiers à potentiel. On commence à avoir l’habitude. Modèle Convention citoyenne pour le climat, avec des débats bien dirigés par des experts et autres scientifiques. Pour y participer, le tirage au sort, ou faudra-t-il faire ses preuves de « noiritude » ou de « maghrébinité », à l’image des preuves de noblesse pour monter autrefois dans les carrosses du roi ? Sur combien de générations ? Comme l’a tweeté Marine Le Pen, « diviser en fonction de l’origine ou de la couleur, que ce soit pour discriminer ou pour honorer, c’est attenter à l’unité nationale, tomber dans le racialisme et le communautarisme ». Emmanuel Macron tombe les deux pieds dedans. Mais il semble le faire exprès.

Et puis, l’on ne peut que se poser cette question : quels héros sortiront de cette consultation ? Naïvement, on peut se dire que cela permettra, quand ce n’est pas déjà fait, de mettre en avant des tirailleurs sénégalais, des tabors et autres harkis qui ont versé leur sang pour la France. Et ce serait justice. Mais lisez bien ce qu’a dit le Président : « Notre jeunesse et toutes celles et ceux qui se retrouvent dans ces histoires un peu fragmentées, fracturées, mais qui pour moi sont une richesse, parce que ce sont des histoires avec plein d’harmonie, qu’ils puissent les choisir… » Derrière ce charabia alambiqué, que faut-il comprendre ? Que le grand-oncle fellagha, qui fut un « héros » de l’indépendance algérienne, soit un jour reconnu par la République française avec sa statue au milieu du quartier ?

Georges Michel
Georges Michel
Editorialiste à BV, colonel (ER)

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