Après la départ de Chantal Jouanno, Jean-Paul Delevoye est pressenti pour prendre la tête de l'organisation du grand débat national. Pour la Manif pour tous, qui s'est vu refuser abusivement sa pétition de 700.000 signataires quand monsieur Delevoye était président du CESE, il s'agit d'un signal très négatif... Sa présidente, Ludovine de La Rochère, réagit au micro de Boulevard Voltaire.

Suite au retrait de Chantal Jouanno du grand débat, plusieurs voix dans le gouvernement souhaitent que Jean-Paul Delevoye conduise le débat. La Manif Pour Tous le connaît bien. Il a refusé sa pétition lorsqu’il était au Conseil économique, social et environnemental (CESE).
Comment accueillez-vous cette possibilité ?

Je l’accueille de manière très négative. À l’époque, 850 000 personnes avaient signé notre pétition pour le projet de loi.
Le fait que monsieur Delevoye ait, à l’époque, piétiné et jeté à la poubelle cette pétition a marqué un très grand nombre de personnes. Au-delà de tous ces signataires, cela a été un déni de démocratie majeur qui a laissé des traces profondes.

Ce n’est pas forcément un très bon signal envoyé si monsieur Delevoye prenait la tête de ce débat…

Effectivement, ce serait un signal extrêmement négatif. Il faut savoir que cette pétition avait été faite dans la forme réclamée par la loi. Il faut se rappeler que Jean-Paul Delevoye avait demandé à Jean-Marc Ayrault, Premier ministre à l’époque, ce qu’il devait faire. Une note du secrétariat général du gouvernement lui avait été adressée. Il avait pris sa décision de rejet en suivant exactement les termes de cette note pour rejeter cette décision.
Il avait employé un prétexte juridique faux. Ils avaient d’abord reconnu que tout était fait dans les formes adéquates. Ensuite, Jean-Paul Delevoye avait prétendu que le CESE ne pouvait pas se saisir d’une question dès lors que le projet de loi était déjà en débat au parlement. Cela est faux. La loi du 28 juin 2010 n’empêche pas le CESE de traiter une question dès lors qu’il y a suffisamment de signataires et que les conditions sont remplies. Monsieur Delevoye a donc même été capable d’une démarche illégale et malhonnête.
En France, on s’aperçoit aujourd’hui que le pays réel ne se sent pas reconnu par nos gouvernants. Emmanuel Macron avait dit pendant sa campagne que les sympathisants de la Manif Pour Tous avaient été humiliés. S’il osait nommer Jean-Paul Delevoye pour ce grand débat national, ce serait véritablement une provocation à l’égard de très nombreux Français.
J’ajoute par ailleurs que Jean-Paul Delevoye préside la commission des investitures LREM. C’est un macroniste de la première heure. Il ne pourra pas être neutre.
De surcroît, il est aujourd’hui Haut commissaire à la réforme des retraites. Il a donc organisé dans ce cadre-là une consultation citoyenne sur la question des retraites dont personne n’a entendu parler. Elle s’est achevée il y a plusieurs semaines. Personne n’en a entendu parler. Dans le déroulé des préparatifs de cette réforme des retraites, ils veulent travailler en cercles restreints entre spécialistes et technocrates. Cette consultation citoyenne ne sera sans doute pas prise en compte.

Le gouvernement organise des séminaires sur le projet futur de la loi de bioéthique.
Ce sont des séminaires à l’adresse des parlementaires. La Manif va suivre ces séminaires.
Selon vous, que va mettre le gouvernement dans ces séminaires ?

Le gouvernement a annoncé, par l’intermédiaire de Benjamin Griveaux, qu’il allait organiser des séminaires thématiques pour présenter de façon approfondie aux parlementaires, les sujets qui seront abordés dans le projet de loi de bioéthique. Ce séminaire aura lieu à partir de fin janvier jusqu’en février. Dans les 6 thèmes annoncés pour ce séminaire, quatre concernent la procréation. Cela montre bien le sujet qui leur importe. En l’occurrence, c’est la PMA dite pour toutes, la PMA post mortem, la consommation ovocytaire, la filiation et l’accès à l’identité des donneurs de gamètes.
Ce projet de loi se dessine.
Cette procédure tout à fait inhabituelle n’est pas du tout prévue dans le travail parlementaire et à l’évidence pourrait fausser les débats à venir. Elle est destinée aux parlementaires de la République En Marche. Uniquement les parlementaires de la République En Marche ont été informés aujourd’hui par mail. Vraisemblablement, on va leur asséner tous les arguments qui conviennent en faveur de la PMA sans père, de la PMA post mortem, de l’auto-conservation ovocytaire, etc.

Cet article a été mis à jour pour la dernière fois le 12/01/2019 à 20:23.

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11 janvier 2019 à 20:16

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