Les ARS : incapables, boucs émissaires ou les deux ?

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« C’est incompréhensible. Ils sont totalement inopérants. » Ce haut gradé de l’armée n’en revient pas. Dans une région de France que nous ne nommerons pas, l’agence régionale de santé, organisme censé être le relais du ministère de la Santé et de l’État sur les territoires, semble ne pas assurer ses missions et c’est le moins que l’on puisse dire.

En effet, sollicité pour approvisionner les pharmacies en masques et en gel hydroalcoolique, ce militaire a découvert toute l’ampleur de l’inertie de ce lourd pachyderme pour le coup totalement « made in France ». « On a demandé à l’ARS de nous fournir un fichier des pharmacies de la région pour proposer une distribution de matériel médical. Ils ont mis une semaine à nous fournir un fichier pas à jour comportant des officines fermées depuis plusieurs années. » Lassé, ce haut gradé demande à l'un de ses subalternes de s’en charger : cela lui a pris deux heures ! Deux heures pour un travail complet, contre une semaine pour un travail bâclé. Dont acte.

Dans le sud, c’est Robert Ménard qui ne décolère pas. L’édile de Béziers avait prévu, en concertation avec les professionnels de la ville, de tester tous les personnels spécialisés dans la petite enfance. Auxiliaires en puériculture, instituteurs… Près de 800 personnes « testables en une demi-journée », précise M. Ménard. N’attendant rien de l’État, il ne s’attendait donc pas à ce que la préfecture et l’ARS locale viennent lui interdire de tester sa propre population ! « On est sur la même rhétorique que pour les masques. Comme ils n’en ont pas, ils nous interdisent les tests pour d’obscures raisons médicales qui seront levées lorsqu’ils seront eux-mêmes en mesure de le faire », tempête le maire.

Dans le Grand Est, le directeur de l’ARS a été pour sa part limogé. La raison ? Avoir maintenu un plan qui devait se traduire par la suppression de 174 lits et 598 postes, via des non-remplacements de départs en retraite. Le directeur, M. Lannelongue, avait assuré lors d'une conférence de presse : « Il n’y a pas de raison de remettre en cause le plan pour le CHRU de Nancy […] Le dossier devrait être examiné début juin. […] La trajectoire reste la même. »

Une maladresse qui sonne comme un aveu d’incapacité à se confronter au réel. Une maladresse qui coûte cher pour les centaines de salariés de ces institutions dont, on n'en doute pas, beaucoup ont à cœur d’être utiles et de rendre service à la population. Une volonté d’économie par ailleurs parfaitement mal placée alors que l’Est a été en première ligne face à l’épidémie. Il faut savoir que le plan de finance 2018 allouait un budget de fonctionnement de 600 millions d’euros aux agences sur le territoire national.

Et les exemples se multiplient. Sur Twitter, le compte Infirmières en colère laisse la parole à Sandrine, infirmière à Lille : « Toutes les infos qui nous remontent confirment une incapacité des ARS et #administrations face au coronavirus. Plus occupées à préserver leurs prérogatives qu'à encourager les bonnes volontés et les bonnes initiatives. L'État impuissant. » Hélas, ces monolithes pesants handicapent plus qu’ils n’aident. On attendait de la flexibilité et de la hauteur, on se retrouve avec un bloc de béton non armé.

Marc Eynaud
Marc Eynaud
Journaliste à BV

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