Le traité de Versailles (2/7)

Georges_Clemenceau_par_Nadar

Le traité de Versailles, signé le 28 juin 1919 dans la galerie des Glaces du château de Versailles, met un terme définitif à la Première Guerre mondiale sur le front occidental.
Résultant d’un processus diplomatique de plus de six mois qui a connu quelques vicissitudes, il fixe les règles selon lesquelles la paix sera appliquée. Second épisode de notre feuilleton qui retrace ces jours historiques.

Cependant, les discussions de cette conférence traînent en longueur. Elles sont marquées par l’absence de prise de décision et par les longues auditions des desiderata des représentants des États aspirant à la reconnaissance internationale. Ces derniers sont renvoyés à des commissions territoriales au sein desquelles différents types d’experts (géographes, militaires, économistes, historiens, etc.) proposent des lignes frontalières à insérer dans les traités. « Le congrès ne danse pas encore, mais il commence à prendre le thé », ironise Le Journal du 24 janvier 1919, en faisant allusion à la réception du président Wilson dans son hôtel de la rue de Monceau.

Le quotidien, fondé en 1892 par Fernand Xau, stigmatise aussi le fait que « l’ordre du jour continue à trahir une certaine incohérence ». En réalité, deux camps se déchirent : les tenants d’une paix de conciliation, menés par le président des États-Unis, et ceux d’une paix de vengeance, conduits par l'intraitable Georges Clemenceau. Mais celui-ci est victime, le 19 février, d’un attentat en sortant de son domicile de la rue Franklin (16e arr.). Un jeune anarchiste de 23 ans, Emile Cottin, surgit de derrière une vespasienne et tire dix cartouches sur l’automobile du président du Conseil. L’une atteint Clemenceau à l’omoplate, « sans lésion viscérale », note le médecin-major Laubry, venu ausculter le patient. Le Tigre[ref]Surnom de Clemenceau[/ref] remarque : « C’est une sensation qui me manquait. Je n’avais pas encore été assassiné. » Dès le lendemain, il se remet au travail, à son domicile, prenant connaissance des dépêches essentielles, signant les actes du gouvernement, recevant ministres et maréchaux. Il reprend sa place à la conférence de la paix le 28 février.

Le 1er mars, les représentants consacrent leurs travaux à l’examen des préliminaires de paix. La presse, qui suit les débats au jour le jour, s’émeut qu’on ait mis six semaines à aborder enfin ce sujet ! Le Figaro, dans son édition du 3 mars, indique que les conditions de paix pourraient être prêtes entre le 14 et le 25 mars et que l’Allemagne pourrait être convoquée pour la signature dès le 1er avril. Il n’en sera rien. Car à la fin du mois de mars, seules les clauses militaires de la future paix ont été décidées : interdiction du service militaire en Allemagne, armée limitée à 100.000 hommes, interdiction de reconstituer l’armée blindée et l’aviation, démilitarisation de la rive gauche du Rhin.

Lloyd George prend conscience qu’une paix trop dure contre l’Allemagne attisera la rancœur envers le clan des vainqueurs et que le sentiment de revanche changera irrémédiablement de camp. L’enjeu majeur est, bien entendu, la question des réparations. Celles-ci, selon les estimations, s’élèvent à plus de 120 milliards de francs pour les seules régions envahies - environ 24 fois le chiffre de l’indemnité de 1871. Comme le signale Le Journal du 1er mars 1919, l’intérêt et l’amortissement d’une telle somme en trente ans « représente la bagatelle de 10 milliards [de francs, NDLA)] par an ! Or, avant de payer un sou d’indemnité, le contribuable allemand aura à verser 19 milliards de marks, 23 milliards de francs, rien que pour le budget de l’État. »

Cette position défendue par le Premier ministre britannique laisse entrevoir une crise au sein de l’alliance interalliée. Elle explose quand le président américain s’oppose aux prétentions françaises sur la Sarre. La délégation française entend notamment récupérer les bassins houillers de cette région allemande en compensation des mines françaises qui avaient été dépouillées puis détruites pendant les hostilités. Les troupes françaises occupent d’ailleurs, depuis le 23 novembre 1918, Sarrebrück et la majeure partie de ce Land[ref]Le colonel Stuhl était administrateur du cercle de Sarrebrück-ville, le capitaine de Villiers de Sarrebrück-campagne, le commandant Junot d’Abrantès d’Ottweiler, le commandant Buat de Saint-Wendel, le commandant Bastiani de Birkenfeld.[/ref]. Le président américain s’oppose aussi au Premier ministre britannique, qui lui présente un projet de sanctions élargies envers l’Allemagne.

La tension est telle entre les quatre, mais principalement entre Wilson, Clemenceau et George, que le président américain fait préparer son navire, le George-Washington, pour repartir rapidement aux États-Unis s’il le décidait.

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