Saisi par le ministère de la Santé, le Conseil scientifique a rendu, le 7 octobre, un avis public de 53 pages. Bonne nouvelle, annoncent les experts, qui tiennent cependant à rester prudents : « Depuis la rentrée scolaire début septembre, les indicateurs épidémiologiques sont en constante amélioration. […] Cette amélioration de la situation sanitaire permet la reprise d’activités économiques et sociales dans des conditions se rapprochant de la normale. Il paraît donc légitime de poser la question d’une levée plus ou moins rapide des mesures de restriction et plus précisément de l’usage du passe sanitaire. » Levée d'autant plus nécessaire qu'elle permettrait de « répondre à un certain nombre d'interrogations sociétales/démocratiques relatives à l'utilisation du passe sanitaire tout en faisant confiance aux citoyens ». Merci, enfin !

Ainsi, le Conseil scientifique de préconiser un usage du passe qui doit rester « temporaire et proportionné » et de mettre en garde sur « le risque de banalisation du passe sanitaire ». Car s’il est aujourd’hui requis pour - attention, la liste est longue ! - les cinémas, bibliothèques, musées, salles de théâtre, concerts, festivals, galeries d'art, parcs d'attractions, salles de jeux, discothèques, gymnases, stades, salles de sport, piscines, événements, foires et salons, bars et restaurants, y compris en terrasse, TGV, Intercités, Ouigo, autocars interrégionaux, avions (qu'il s'agisse d'un vol national ou international), hôpitaux (sauf pour les urgences), aux plus grands centres commerciaux, dans les départements les plus touchés, et pour se déplacer à l'étranger, la majorité des Français a donc dû s’y plier bon gré mal gré. Et, de fait, le passe n’est plus un obstacle pour ces usagers habituels qui ont parfaitement intégré ce contrôle dans leur vie quotidienne et s’en trouvent à peine entravés.

Et c’est là que cela devient cocasse. Le rapport du Conseil scientifique recommande deux types de scénarios : soit une « sortie rapide voire immédiate », soit une « sortie différée du passe sanitaire après une période de préparation à la sortie (entre le 15 novembre et la fin d’année 2021) ». Son objectif est écrit noir sur blanc : la sortie du passe sanitaire, accompagnée d'une prudence active. Et en même temps, Gabriel Attal nous annonce la possibilité, pour le gouvernement, de prolonger les mesures sanitaires, dont le passe sanitaire, jusqu'à l'été 2022 ! Ainsi, un avant-projet de loi a été déposé au Conseil d'État fin septembre, le projet sera présenté le 13 octobre et une discussion au Parlement se tiendra à partir du 19 octobre.

Alors, qui croire, qui écouter ? Contre les recommandations des scientifiques craignant une installation du contrôle social, la Macronie semble faire fi de cet avis pour le maintenir jusqu’à l’été. Si l’instauration du passe a donné un véritable coup d’accélérateur à la vaccination - près de 73 % de la population totale présente « un schéma vaccinal complet » -, cet outil contraignant devient limité.

Primo, le passe sert à certifier que la personne qui le présente n'est pas porteuse du virus. Nous savons, désormais, que cet argument est caduc. Secundo, instauré pour obliger toutes les personnes à se faire vacciner, il restait encore, en juillet, selon l’assurance maladie, « plus de cinq millions de personnes souffrant de comorbidités » qui n’étaient pas encore vaccinées contre le Covid-19. Plutôt que de faire peser sur la société entière un système de contrôle social, il eût mieux valu concentrer ses efforts et ses moyens sur les personnes qui en avaient le plus besoin. C'est l'un des points de fragilité évoqués dans ce rapport. Enfin, tertio, c’est oublier que certains petits malins se refilent le QR code et que les ventes de faux passes font florès sur les réseaux sociaux.

Il serait grand temps, donc, de suivre les conclusions prudentes de ce rapport qui visent à lever le passe et, surtout, comme disait Pompidou, d’arrêter « d’emmerder les Français » !

 

 

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08 octobre 2021 à 14:59

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