La tenue du pape Léon XIV : la mozette mais pas les mules !

Le nouveau pape s’est donc soumis à la tradition. En partie...
Capture d'écran X
Capture d'écran X

Tout le monde l’a remarqué : pour sa première apparition à la loggia de la basilique Saint-Pierre, le pape Léon XIV a ressorti du vestiaire la mozette*, délaissée par le pape François. Bon, n’allons pas tout de suite imaginer que le nouveau souverain pontife va réintroduire hic et nunc les culottes à la française sous la soutane à queue et les flabella en plumes d’autruche pour les grandes cérémonies pontificales, mais ce détail vestimentaire qui n’en est pas un, en fait, a presque suscité un début de polémique. Des fois que ce pape soit un conservateur ! Par exemple, note VSD, « les premières critiques fusent » et le magazine ajoute : « Contrairement à son prédécesseur qui était apparu sur le balcon dans une soutane de soie blanche, gage de sa "simplicité", le nouveau pape Léon XIV marque déjà les esprits au fer rouge. »

Gage de simplicité, vraiment ? La vraie simplicité n’est-elle pas celle qui consiste, justement, à ne pas se distinguer mais, au contraire, à s’inscrire discrètement dans la lignée de ses prédécesseurs ? Sur cette mozette, courte capeline portée traditionnellement par les prélats, le nouveau pape arborait une étole antique, insigne du prêtre – rappelons-le - chargé de la tiare pontificale et des clés de saint Pierre en broderie d’or, apparemment celle-là même que portèrent, le jour de leur élection, les papes Benoît XVI, Jean-Paul II, Jean-Paul Ier, Paul VI et, nous semble-t-il, Jean XXIII. Lors de son élection, Bergoglio avait refusé ces ornements que lui avait présentés le cérémoniaire d’alors, le pauvre Mgr Guido Marini, qui en fut bien marri, lui qui avait été si en phase avec les goûts liturgiques de Benoît XVI. Une rumeur voudrait même que le pape argentin ait déclaré : « Je ne m’en servirai pas. Le carnaval est terminé. » Commérage de sacristie ou vérité révélée entre deux portes ? Quoi qu’il en soit, semble-t-il, le message n’arriva jamais jusqu’à Paris : preuve en est les insolites et pour tout dire abominables ornements liturgiques portés par l'archevêque de Paris et son clergé, lors de la réouverture de Notre-Dame en 2024…

Le nouveau pape s’est donc soumis à la tradition. Se soumettre et non pas faire à son idée, comme un vrai serviteur : le pape n’est-il pas qualifié, dans sa titulature, de « Serviteur des serviteurs de Dieu » ? Mais puisque nous en sommes à parler chiffon - et Dieu sait que tous les détails ont leur importance -, poursuivons la revue de détail et notons cependant que, pour l’instant, Léon XIV n’a pas chaussé les fameuses mules rouges que portaient les papes depuis des siècles et que François avait refusées, préférant ses magnifiques chaussures orthopédiques qu'on ne pouvait ne pas voir, d'autant que sa soutane était trop courte, laissant même apparaître, suprême inélégance, son pantalon... Les semaines qui viennent nous diront si, en fait, Léon XIV, le jour de son élection, n’avait pas trouvé chaussure à son pied dans le vestiaire papal ou bien s’il a tout simplement décidé de s’inscrire dans les pas de François.

Ce serait pourtant regrettable de renoncer à cette pompe antique qui évoque d’abord le sang du Christ et des martyrs : le pape suit les pas du Christ avant ceux de son prédécesseur. Et puis la pourpre est aussi celle du pouvoir suprême. Les empereurs romains, par ailleurs souverains pontifes de Rome, n’étaient-ils pas chaussés de rouge et les fils d’empereur qualifiés de « porphyrogénètes », c’est-à-dire « nés dans la pourpre » ? Le christianisme, par essence religion incarnée, est né en Judée et Galilée mais s’est développé et structuré dans l’Empire romain, finissant même par l’investir et prendre le pas sur l’antique religion romaine, souvent en construisant ses églises sur les anciens temples païens. L’appropriation, au Moyen Âge, par les papes du titre romain de « pontifex maximus » ou « summus pontifex » résume d'ailleurs ce triomphe du christianisme. C’est un peu tout cela que rappelaient ces curieux mocassins qui ne sont donc pas qu’une innocente coquetterie de monsignore.

Cela dit, le pape Léon XIV semble vouloir renouer avec un certain classicisme vestimentaire qui convient à la dignité de sa charge. Preuve en est son portrait officiel (qui n'est pas de pied en cap !) publié, ce samedi 10 mai, par L'Osservatore Romano. Cette fois-ci, le carnaval est peut-être vraiment terminé.

 

 

*Camail ou courte pèlerine, boutonnée sur le devant

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Georges Michel
Editorialiste à BV, colonel (ER)

Vos commentaires

21 commentaires

  1. Je suis athée. Cependant j’ai lu sur le visage de Léon XIV une émotion profonde et sincère lorsqu’il est apparu à la loggia. Ce sentiment a été renforcé quand il a taquiné les journalistes salle Paul VI qui l’applaudissaient chaleureusement en leur disant qu’il espéraient que ceux-ci l’applaudiront encore une fois son discours terminé. Une personne qui a de l’humour est une personne intelligente, ce qui n’était pas le cas de son prédécesseur, jésuite borné et hypocrite d’extrême-gauche.

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