Vendredi 7, le tribunal correctionnel de Paris a condamné trois candidats possibles au Jihad à des peines de 2 à 4 ans fermes. Les trois avaient été arrêtés en 2012 à l’aéroport de Saint-Etienne, en route vers l’Orient « ténébreux » – et sanglant – via la Turquie. Motif de la poursuite : « Association de malfaiteurs en vue de la préparation d’actes terroristes ». Pas question de prendre les menaces terroristes à la légère mais l’affaire Merah a montré que ce dernier était connu par les services (la DCRI) depuis 2006. Cela n’a pourtant pas empêché ses crimes. Alors, effet de manches ou action réelle dans le cas présent ?

Vient aussi d’être condamné à 1 an ferme et 2 avec sursis un certain Romain, alias Abou Al-Normandy (!), habitant de Caen (Basse-Normandie). Encore un qui aurait mieux fait d’aller écouter les cours de l’Université populaire de Michel Onfray plutôt que de vouloir mener la « guerre sainte » numérique. Tout cela ne se comprendrait sans doute pas sans le fond de misère culturelle et identitaire des certains jeunes issus bien souvent de l’immigration. Cela pose tout de même aussi quelques questions. L’une d’entre elles est que, après avoir porté au pouvoir des proches d’Al-qaida en Libye, les gouvernants français sont mal venus pour s’étonner que cette mouvance fasse des petits. Ensuite, nous soutenons les mêmes fondamentalistes en Syrie. Pas étonnant que certains prennent au sérieux notre soutien aux rebelles anti-Bachar el-Assad, guère moins cruels que les milices de ce dernier. Que font nos présumés apprentis combattants sinon vouloir accélérer la chute d’un gouvernement non sunnite selon leurs vœux et que les gouvernants français appellent aussi à céder la place ? Là encore, nous serions dans une situation plus saine et plus claire si nous avions moins joué avec le feu. Enfin, les volontaires pour le Jihad en Syrie sont-ils plus ou moins dangereux pour nos compatriotes que les dealers et gangsters qui contrôlent des quartiers entiers de banlieues ? Question à mettre au programme des concours de magistrats.

Autre question gênante. Le principe du droit, c’est de sanctionner les actes commis, pas ceux qui pourraient peut-être survenir. Auquel cas, il faudrait condamner tous les porteurs de dictaphone en supposant qu’ils ont peut-être le projet d’enregistrer des conversations privées, tous les hommes excités sous prétexte qu’ils ont peut-être l’intention de commettre un viol, etc. Passer de la présomption d’innocence à la présomption de culpabilité, ce n’est pas rien. Prendre tant de liberté avec le respect des libertés, cela devient une habitude des ministres de l’Intérieur depuis une bonne décennie.

Justement, qui connaît la loi du 10 mars 2010 ? Elle porte sur la rétention de sûreté, créée par la loi du 25 février 2008. Vous avez purgé votre peine, vous sortez de prison, mais… qui sait si vous n’allez pas récidiver, alors vous restez en prison. La prévention de la récidive implique donc la rétention de sûreté ou au minimum la surveillance de sûreté. En février 2014, le contrôleur des lieux de privation notait que, à Fresnes, les personnes placées en rétention de sûreté avaient été condamnées avant la loi de 2008. Le Conseil constitutionnel avait pourtant indiqué que la loi ne pourrait s’appliquer aux personnes condamnées avant sa publication. Un principe essentiel de non rétroactivité.

Revenons à nos apprentis jihadistes condamnés. Et si notre société provoquait l’ennui au sein d’une fraction de la jeunesse avide d’idéal même dévoyé, même prodigieusement antipathique ? On ne vit pas que d’envie de « tunes », de stages « qualifiants » (ou pas), ni de revente de « shit » dans les cités. Certains veulent du risque, de l’engagement, du feu. On appelle cela l’ordalie. Au pire, cela donne les jihadistes, au mieux les gars qui, il y a 70 ans, entraient dans la Légion étrangère et se retrouvaient en 1941 dans les Forces Françaises Libres. Autre temps autres mœurs.

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9 mars 2014

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