L'émission "Grand Angle" présentée sur BFM TV a diffusé, ce mercredi, une interview exclusive de Jawad Bendaoud, le "logeur de Daech", récemment relaxé des faits de "recel de malfaiteurs terroristes". L'affaire n'en est pas classée pour autant, le parquet ayant fait appel : un nouveau procès devrait se tenir d'ici un an. En attendant, Jawad a décidé de quitter le 93 pour une ville côtière du Sud où il tente de reprendre une vie normale, loin des regards suspicieux ou moqueurs.

C'est au micro de Salhia Brakhlia que le mis en cause s'est confié : il y affirme son innocence et sa méconnaissance du caractère terroriste des personnes qu'il hébergeait, mais demande néanmoins pardon aux familles des victimes et dit regretter certains propos maladroits qu'il a pu tenir durant son procès. Il déclare assumer pleinement ses responsabilités et avoir conscience que cette affaire le poursuivra toute sa vie. Enfin, Jawad a tenu à démentir les fake news selon lesquelles il fanfaronnerait sur les réseaux sociaux et s'y ferait nommer "le logeur de Daech". Ses comptes ont, effectivement, été piratés et des messages faisant l'apologie du terrorisme y ont été postés par des tiers. "La suite, ce sera au calme […] avec mon fils", conclut le trentenaire, qui a déjà confié son souhait de devenir restaurateur, mais aussi d'écrire un livre afin de livrer sa vérité.

L'interview de Jawad a déclenché, notamment sur les réseaux sociaux, une vague d'indignation. La première chaîne d'information est accusée de surfer sur le malheur des victimes et de vouloir faire du sensationnalisme.

Dans la catégorie "mauvais goût", certains internautes ont fait des allusions sur les origines de la journaliste, suggérant une forme de collusion morale ou de solidarité ethnique entre elle et le mis en cause. Pour preuve, ils se basent sur les propres mots de Salhia Brakhlia, qui déclare qu'elle a pris un café avec Jawad avant de réaliser l'entretien… ce qui serait, selon eux, une preuve à charge. Ayant été plusieurs fois candidat à des élections, je peux témoigner : il est tout à fait normal qu'un interviewé et un journaliste prennent un café et discutent avant d'attaquer l'interview, sans que ce soit le signe d'un quelconque parti pris ou d'un soutien.

Si de nombreuses victimes considèrent toujours la relaxe de Jawad Bendadoud comme une injustice, d'autres ont préféré faire la part des choses, comme Abdallah Saadi, qui a perdu deux sœurs ce jour fatidique du 13 novembre 2015, ou Bilal Mokono, blessé au Bataclan. Me Jean Tamalet, avocat de plusieurs victimes, a lui aussi dit "entendre" le message de Jawad Bendaoud et a noté plus de maturité dans les propos de ce dernier. L'avis des victimes et de leurs représentants compte sans doute plus que celui des twittos…

Les attaques envers BFM TV apparaissent d'autant plus injustifiées que ladite interview a été visionnée par plusieurs centaines de milliers de téléspectateurs… dont peut-être une partie de ceux qui en critiquaient l'indécence. BFM est une entreprise qui ne fait que répondre à la demande de la clientèle. Or, au vu des parts d'audience, on peut en déduire qu'une grande partie des ménages s'est montrée curieuse d'écouter les confidences de Jawad.

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08 mars 2018 à 9:08

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