Dans une interview au magazine Le Chasseur Français, paru mercredi 20 octobre, François Hollande clame haut et fort son amour des chasseurs, pourtant considérés comme des monstres par ses soutiens écologistes, membres de la majorité présidentielle. Coup de com' ou manœuvre électorale ? Certainement les deux, compte tenu des prochaines échéances que sont les régionales, et plus encore, les présidentielles.

« Il faut différencier les exercices médiatiques, aller chercher les publics les uns après les autres », déclarait Gaspard Gantzer, le conseiller en communication de François Hollande. Cette méthode que les politologues nomment la "segmentation" consiste effectivement à s'adresser à chaque catégorie socioprofessionnelle séparément, à défaut de tous les convaincre par un seul discours général. Le Président semble avoir compris la leçon à merveille. On l'avait entendu sur RTL, puis sur Gulli… une chaîne pour enfants. C'est à présent à la France rurale qu'il déclare son amour, avant de filer en Seine-Saint-Denis à la conquête des banlieues.

Le Chasseur Français, qui fête ses 130 ans, réalise un excellent "coup éditorial" avec cette Une où le Président apparait en marge d'une couverture consacrée à la bécasse des bois…

L'entretien commence sur un ton bon enfant. Le Président raconte son enfance rurale, « j'ai toujours vécu avec des vaches », lance-t-il… Puis la conversation prend une tournure plus sérieuse: éloge de la chasse, soutien aux bergers face aux loups, fermeté envers les zadistes. François Hollande va jusqu'à évoquer les dégâts des sangliers et à affirmer (avec raison a-t-on envie de dire) que les chasseurs participent au « renouvellement de la faune et de la flore » et déplore les « caricatures qui leur sont accolées »; des propos qui pourraient faire grincer des dents du coté des écolos.

Petit décryptage: les chasseurs sont environ un million en France et constituent un vivier d'électeurs potentiels pour un candidat à la présidentielle. « Ce ne sont pas des gens qui nous sont spontanément favorables », déclare-t-on à l'Élysée sur un ton euphémique. Eh oui, la ruralité en général est lasse de la gauche bobo-écolo, de ses normes étouffantes, et de son hystérie anti-rurale. Par cet entretien, Hollande semble vouloir attirer à lui ces millions de paysans qui regardent impuissants et hébétés, disparaître leur mode de vie. Dans le système ultra-présidentialisé de la Ve République, il est devenu courant qu'un président de gauche drague un électorat ancré à droite, et vice-versa.

Les chasseurs mordront-ils à l'hameçon de ce pêcheur en eau douce qu'est François Hollande ? Pour le bien de notre pays et de sa ruralité, espérons que non.

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22 octobre 2015

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