Un très proche de François Hollande, l’avocat Jean-Pierre Mignard dit : « La question qui est posée en France, c'est la question d'une grande coalition, comme en Allemagne, et donc il faut changer la Constitution ». Un tel propos ne tombe pas par hasard au moment où Hollande bat des records d’impopularité, et où les sondages mettent Marine Le Pen en tête au premier tour en cas d’élections présidentielles anticipées. Que peut faire Hollande ? Ne rien faire et c’est évidemment possible. Mais il lui reste plus de deux ans pour finir son mandat. Peut-il creuser encore son impopularité ? Autre option : dénouer la crise par une législative anticipée. S’il dissout l’assemblée, la droite UMP l’emporte. Avantage : Hollande peut reprendre un peu de couleurs comme chef de l’opposition. Mais il n’est pas Mitterrand en 1986, et il est trop tard pour son redressement. Au passage, le PS se sera effondré, plus qu’en 1993 sans doute. Réduit à 30 ou 40 députés, voire moins, le PS ne le pardonnera pas à Hollande. C’est un inconvénient. Le second est que le pays réel sera de plus en plus en grand écart avec ses représentants. Le FN, avec sans doute 25 % des voix, peut-être à nouveau premier parti de France, n’aura, au scrutin majoritaire, que 10 députés au mieux. À ce stade de décalage, cela devient un problème.
Supposons une autre voie. Si François Hollande n’est plus en mesure de porter une réforme de la Constitution (il n'a plus les moyens de la mettre en œuvre), il pourrait s'atteler à une réforme du mode de scrutin : la proportionnelle (départementale ou régionale, qu’importe). Une proportionnelle simple, sans prime majoritaire. Pour faire voter cette réforme, cela tombe bien : le PS exécute ; ses alliés, les Verts y ont intérêt, et les autres formations de gauche, PC et mélenchonistes aussi. Au final, toutes les gauches y ont intérêt, et elles sont majoritaires dans l’actuelle assemblée. La réforme est donc votée, peut-être même avec des voix centristes. Voilà qui change tout. Le FN et l’UMP sont au coude-à-coude, peut-être même le FN est-il le premier parti de France, comme aux européennes.
Mais il ne peut gouverner, même avec, hypothèse haute, 150 élus sur plus de 570. Problème : l’UMP non plus ne peut gouverner seule. Pas question pour elle de s’allier au FN, surtout avec un énorme FN. Quant au PS, avec la proportionnelle, il n’échappe pas à un gros revers, mais il limite les dégâts, il garde 70 députés, un peu plus ou un peu moins. Ce n’est pas le désastre historique qui le guette au scrutin majoritaire. Alors, qui peut gouverner ? Un Premier ministre issu de l’UMP, un Juppé, un Fillon ? Sans doute, mais pas tout seul. Reste une solution. Avec une grande coalition, avec les socialistes gardant le tiers des ministères, concédant le reste à l’UMP et aux centristes. Bilan : Hollande évite le désastre à ses petits camarades, il sort du jeu à terme, mais en ayant changé les règles. On lui sait gré, à gauche en le disant, au FN sans le dire, d’avoir rapproché la représentation parlementaire du pays réel. Le FN entre en force à l’assemblée mais ne peut gouverner. A terme, il est toutefois la seule grosse opposition, outre le Front de gauche, loin derrière, à la grande coalition « UMPS ». Marine Le Pen a le temps de roder ses équipes. L’histoire est ouverte.
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