Le samedi 29 octobre se sont déroulées, en Islande, les élections législatives anticipées qui devaient permettre de former un nouveau gouvernement suite à l'implication de certaines personnes dans l'affaire des Panama Papers. On attendait, depuis quelques mois, une victoire du "Parti pirate" (PP), parti de tendance libertaire et anarchiste, qui finalement n'est arrivé que 3e avec neuf sièges. C'est un progrès pour eux, qui n'avaient que trois sièges précédemment, mais qui ne leur permettra pas de participer au gouvernement.
Certains médias internationaux parlent d'une forte abstention qui montrerait un rejet de la politique. La cause de l'abstention observée semble pourtant autre : ce samedi, une tempête a sévi dans la région de Reykjavík, obligeant par exemple le report du Þjóðahátið Vesturlands, grand festival culturel ayant lieu chaque année. La chute du PP est en fait plus profonde : alors qu'il avait 35 % d'opinions favorables en février, le scandale Panama Papers et l'annonce des élections anticipées lui a fait mener une campagne qui l'a fait connaître plus en profondeur par la population islandaise, mais passer, en moins d'un mois, sous la barre des 30 %, avant une longue pente douce. Les derniers sondages avant l'élection ne les mettaient plus qu'à 19,4 % des intentions de vote.
Leur résultat, à savoir 14,4 %, est pour eux une forte déception. Ils avaient l'intention de former un gouvernement de coalition avec trois autres partis de gauche, ce qui n'est maintenant plus possible, ces quatre partis réunis n'atteignant pas la majorité. Ce scénario n'était, de toute façon, pas probable puisque seul le parti écologiste de gauche aurait accepté de travailler avec le PP.
Le parti sortant, Sjálfstæðisflokkur, malgré le scandale Panama Papers et le dérapage de Bjarni Benediktsson sur la fiscalité des faibles revenus la semaine dernière, arrive en tête de l'élection en remportant 21 sièges. Bien que la politique d'austérité ne soit pas appréciée par beaucoup, il faut lui reconnaître une efficacité économique, la couronne ayant progressé de près de 10 % par rapport à l'euro depuis début juillet. La gouvernance ne sera pas pour autant facile : en effet, il faut 32 députés pour avoir la majorité, or le Sjálfstæðisflokkur et son allié actuel, le Framsóknarflokkur, n'en sont qu'à 29. Si le Sjálfstæðisflokkur devient le parti formateur, il devra faire alliance avec un troisième parti. Le Viðreisn, nouveau parti issu du Sjálfstæðisflokkur, pourrait être une bonne option, mais leurs positions vis-à-vis de l'Union européenne sont incompatibles.
Deux partis : le Björt framtíð et le Samfylkingin (Alliance démocratique) pourraient aussi permettre d'atteindre la majorité, mais ces deux partis sont en recul, et ont des positionnements économiques plus à gauche. À cela, il faut ajouter l'habitude islandaise de prendre les ministres parmi les parlementaires, ce qui diminuerait la majorité.
L'avenir politique du pays risque bien d'être surprenant. Nous pouvons imaginer la constitution d'une majorité arc-en-ciel, un peu ingérable, ou une situation où il est impossible de former un gouvernement. Nous pouvons faire un parallèle avec la politique belge depuis quelques années, où les périodes d'absence de gouvernement s'étaient révélées bénéfiques pour l'économie du pays. Comme la sortie de la crise de 2008 est surtout imputable à l'afflux de touristes en raison de la dévaluation de la couronne, et que le prétendu abandon des banques relève surtout de la désinformation ou de la manipulation, une absence de gouvernement ne serait peut-être pas si néfaste qu'il n'y paraît.
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