[EDITO] 8 mars : mais qui peut encore dire ce qu’est une femme ?

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Dans mon Leclerc, après la semaine du cochon et avant celle du jardinage, il y a la Journée de la femme. Depuis quelques jours, un présentoir fait la promo du 8 mars. Attention, le chef de rayon, prudent, a choisi ses produits : pas de robot ménager, de produit de beauté ni de puériculture. Rien que des bouquins d’Olympe de Gouges, d’Annie Ernaux et de Simone de Beauvoir. Les femmes ne font plus la cuisine, se désintéressent du soin de leur corps et n’ont que faire des enfants que, d’ailleurs, elles n’ont pas. Les femmes, c’est bien connu, ne sont plus que purs esprits éthérés.

Existent-elles encore, du reste ? On peut légitimement se le demander. C’est sa journée, mais qui est-elle ? Comment définir une femme ? Par des caractéristiques biologiques, son appareil reproductif ? Vous filez du mauvais coton, mes chéris. Il va vous arriver les mêmes bricoles qu’à l’auteur de Harry Potter ! Affirmer que seules les femmes ont leurs règles est crypto-fasciste. Par la maternité ? Quelle horreur. Réduire la femme à son statut de mère, c’est revenir aux heures les plus sombres de notre Histoire et ça s'appelle du néo-pétainisme. Et, d'ailleurs, le mot enceint existe désormais au masculin, n'est-ce pas ?

Quittons donc le registre physique. Peut-on trouver aux femmes une communauté de caractères, peut-être pas propres à toutes mais au moins à la plupart, qui pourrait les décrire : un supplément d’altruisme, de subtilité, de scrupule, de miséricorde, d’empathie, moins de tendance à la colère, moins d’appétence pour la guerre ? Un feu d’artifice de qualités. Mais égrainer ces clichés, c’est faire preuve de paternalisme bienveillant. Arrêtez de dire que les femmes donnent la vie et les hommes la mort, c’est du sexisme antédiluvien. Les femmes n’aiment rien tant que se battre, voyez vous, en tout cas sur Netflix : dans la récente série Cœurs noirs mettant en scène les forces spéciales, tout sonne vrai, sauf l’improbable nombre de snipeuses à chignon et de soldates coupées au carré… Idéologie, quand tu nous tiens. 

Ne parlez plus, non plus, de « beau sexe » - elles revendiquent le droit d’être moche - ni de sexe faible, ce serait condescendant : c’est, du reste, pour cela qu’à présent, on ouvre leurs compétitions sportives aux transgenres. Qu’elles se débrouillent et ne viennent pas chouiner.

Ce qui ne peut plus être défini existe-t-il encore ? Instituée en 1977, la Journée de la femme s’était donné pour objectif de célébrer les avancées des droits des femmes. Quarante-six ans plus tard, la femme a disparu, dépecée, dépouillée de tout ce qui la distinguait. Est-il bien utile de fêter le 8 mars ?

Gabrielle Cluzel
Gabrielle Cluzel
Directrice de la rédaction de BV, éditorialiste

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