On a longtemps cru au FN, et certains continuent de croire, qu’il suffisait de « dédiaboliser » le parti, de développer de bonnes relations avec les médias en évitant tout « dérapage » antisémite ou raciste, et la route du pouvoir serait grande ouverte. 

Pourtant, les dernières élections ont montré que, malgré la progression du FN, il y avait un autre problème. Le FN, qui avait annoncé la fin programmée de l’UMP, est bien forcé de constater que ce dernier résiste pas mal, de même qu’en 2008-2009, Marine Le Pen annonçait la fin de l’euro dans les mois à venir avec aussi peu de succès.

Cela montre les limites de la dédiabolisation. Bien sûr, on ne veut plus des « dérapages » de Jean-Marie Le Pen mais cela ne suffit pas à faire un programme qui gagne les suffrages d’une majorité de Français. D’autant plus que Jean-Marie a des défauts mais garde plus de bon sens en matière économique que ses successeurs, qualifiant de "ridicule" dans Rivarol le maintien de la retraite à 60 ans demandé par les dirigeants du FN.

En fait, on peut questionner les résultats de la dédiabolisation : alors que les sondages d’opinion publique montrent une évolution très forte, ces dix dernières années, de l’opinion des Français vers les positions du FN en matière de sécurité et d’immigration - avec des taux supérieurs à 60 % de gens favorables à un arrêt ou une diminution radicale de l’immigration et plus de sécurité -, cette évolution de plus de 20 points pour différentes questions sur ces thèmes s’est traduite de façon relativement modeste dans les élections. 

Force est de constater que Marine Le Pen n’est pas arrivée au second tour des présidentielles en 2012, alors que son père, en 2002, ayant à l’époque l’image la plus détestable que pouvait avoir un homme politique, les enfants des écoles étant même appelés à défiler dans les rues entre les deux tours de l’élection pour « sauver la République », y était arrivé en passant devant Lionel Jospin qui, lui, avait une très bonne image dans les médias.

La dédiabolisation a certainement un impact considérable sur les médias mais il ne faut pas confondre les médias avec le peuple dans son ensemble. Julien Rochedy, entrepreneur et ancien président du Front national de la jeunesse, donne une partie de la réponse aux succès électoraux relatifs du FN dans une interview à Valeurs actuelles : les théories macroéconomiques du FN, son opposition patriotes/mondialistes quelque peu dogmatique, son idéalisation d’un "État stratège et intelligent" sont éloignées des préoccupations plus terre à terre des Français entrepreneurs, artisans et autres qui se plaignent plutôt de l’envahissement de l’État ou de la hausse des charges, se situant sur le terrain de la microéconomie. Cet aspect des choses est bien trop négligé dans les débats au FN et sur le FN, où l’on accorde beaucoup plus d’importance aux déclarations supposées racistes de Le Pen, qui affectent le microcosme médiatique mais beaucoup moins le peuple.

Cet article a été mis à jour pour la dernière fois le 01/07/2023 à 2:18.

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10 avril 2015

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