La crise sans précédent que traverse la police nationale, et qui se traduit par des rassemblements répétés sur tout le territoire depuis plus de quatre semaines malgré les menaces de sanctions ou les tentatives de dialogue de la hiérarchie policière avec ses subordonnés - constituant d'authentiques actes de résistance -, pose plus que jamais la question de l'encadrement dans la police nationale.
En effet, parmi les revendications des fonctionnaires de police, qui demandent pour l'essentiel les moyens (matériels, humains, et juridiques) de faire leur travail, le désaveu des représentants syndicaux et de la hiérarchie auxquels il est reproché une déconnexion avec les réalités du terrain et un manque de soutien est à prendre très au sérieux.
En ligne de mire des policiers en colère : le corps de conception et de direction (CCD) composé des commissaires et grades supérieurs, à qui la base reproche de se soucier prioritairement de son déroulement de carrière, des primes annuelles mirobolantes octroyées, et de n'apporter aucun soutien à ceux qui ont le sentiment de vider la mer avec une petite cuiller en risquant leur vie quotidiennement.
À l'appui de ce sentiment largement partagé par les gradés et gardiens de la paix, quelques chiffres doivent être rappelés. Chaque mois, près de 500 policiers sont blessés en service. Chaque semaine, en moyenne, un policier met fin à ses jours.
Pourquoi ce parallèle ? Parce qu'il rappelle de la manière la plus concrète possible la dure réalité des difficultés de ce métier qui démotive de plus en plus tôt ceux qui l'ont choisi. D'aucuns pourraient, dès lors, considérer que la hiérarchie sert de bouc émissaire à ce qui pourrait passer pour un ras-le-bol général lié au contexte actuel, les policiers étant sur tous les fronts depuis les actes de terrorisme, la crise migratoire et les violences urbaines… De même qu'il convient de ne pas généraliser - de nombreux chefs de service étant très estimés -, les faits démontrent que le désaveu est amplement justifié.
En première ligne, le directeur général de la police nationale, Jean-Marc Falcone, qui a pour le moins jeté de l'huile sur le feu en choisissant la voie de la répression du mouvement de colère des policiers, et qui a déclaré à la presse s'opposer à toute réforme de la légitime défense pour les fonctionnaires de police (preuve, s'il en est, que l'obligation de réserve est à géométrie variable dans la fonction publique).
Viennent s'ajouter une liste importante de directeurs départementaux de la sécurité publique (DDSP), dont la gestion du personnel est clairement critiquée, en particulier s'agissant du recours systématique à des sanctions déguisées, parfaitement illégales, mais dont ils n'auront jamais à être responsables (seul l'État étant susceptible d'être condamné). Ces pratiques participent du sentiment qu'ont les policiers d'avoir une épée de Damoclès au-dessus de la tête, au point d'hésiter à utiliser leur arme lorsque leur vie est menacée, ce que le drame de Viry-Châtillon illustre parfaitement.
Pour en finir avec cet encadrement du personnel pour le moins déplorable, certains proposent de revoir entièrement le recrutement des policiers en instaurant, à terme, un concours unique. Cela aurait pour effet d'accroître la légitimité des cadres, puisqu'ils auraient appartenu nécessairement aux grades inférieurs dont ils connaîtraient les difficultés, mais aussi d'améliorer la gestion du personnel en ce qu'ils seraient à même de soutenir plus facilement ceux dont ils ont partagé le sort.
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