Après le petit père Combes, l’abbé Castaner !

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Christophe Castaner, dans « Le Grand Jury », a expliqué doctement que « la prière n’a pas forcément besoin de lieu de rassemblement ».

De ministre DES Cultes, il s’est mué en ministre DU Culte, autre nom de l’officiant : il l’organise, sait mieux que les clercs de quoi la prière « a forcément besoin ». Pour le salut de votre âme, suivez les exercices spirituels de saint Castagnace. Bientôt une recommandation sur le nombre de génuflexions et la couleur des chasubles ? Après le petit père Combes, voici le petit père Castaner. Sauf que le premier, du fait de son passage au séminaire - qui lui valut son surnom - et surtout de son époque, avait une fine connaissance de ces « cultes » dont, en se pinçant le nez, il devait s’occuper, quand le second - dont le prénom, « Porte le Christ », laisse pourtant imaginer un humus familial catholique - ignore tout, apparemment, de sa matière. Un ministre de la Santé qui confond un vaccin et un antibiotique, un garde des Sceaux qui ne connaît pas la subtile différence entre une condamnation ferme ou sursis, c’est fâcheux et ça fait désordre. Christophe Castaner ne s’est donc pas intéressé à sa matière et ne connaît rien d’une religion qui partage le destin de la France depuis 1.500 ans, qui lui est même, pourrait-on dire, consubstantielle, un mot, tiens, d’essence théologique. La prière n’a pas « forcément besoin » de lieu de rassemblement, mais il est des sacrements, essentiels à la vie spirituelle du catholique - vitaux, donc -, qui ont « forcément besoin » d’un prêtre, comme la messe, union au renouvellement du sacrifice du Christ. La transsubstantiation - autre mot théologique - est dogme de foi et ne doit pas être confondue avec la simple commémoration des protestants. Il est vrai que, vu de la fenêtre, très lointaine, de Christophe Castaner, tout cela est sans doute Bible blanche et blanche Bible.

Il a le droit, du reste, en son for intérieur, de s’en moquer ou d’en sourire. Mais il a le devoir de faire son boulot. Qui consiste non pas à monter en chaire pour sermonner les paroissiens et leur expliquer comment ils doivent prier mais à garantir la liberté de culte, lequel, pour les catholiques, passe par la célébration d’un certain nombre de sacrements, dont celui central de l'Eucharistie, par un clerc.

Prétendre l’interdire quand des rassemblements de même importance dans des commerces ou de « petits musées » sont autorisés, considérer que ces bigots d’un autre âge n’ont qu’à faire leurs simagrées chez eux si ça leur chante comme d’autres font le poirier ou la position du lotus, c’est ravaler une liberté fondamentale au rang d’activité accessoire, voire dérisoire. Et c’est outrepasser gravement sa fonction.

D’aucuns, agnostiques convaincus, se sentent peut-être peu concernés par cette polémique trempée dans l’eau bénite.

Qu’ils nous autorisent deux remarques…

S’asseoir sur le sacré - dont la « gestion » des morts, scandaleusement expéditive ces derniers temps, fait partie - pour ne juger essentielles que les activités d’ordre sanitaire et alimentaire, dénier à l’homme toute dimension verticale, c’est le mettre à quatre pattes, au niveau du sol comme un animal dont on conviendrait d’appeler le vétérinaire « médecin » et dont l’écuelle serait plus élaborée que le Whiskas™. Les coiffeurs et les magasins de prêt-à-porter vont rouvrir ? Mais on toilette aussi les caniches et on peut même leur mettre un petit manteau...

Les exemples d’obstruction à la liberté religieuse, tant historiques que géographiques, sont rarement signes de jours radieux : Terreur, URSS, Pakistan, Arabie saoudite…

Ce gouvernement trouve que vous « n’avez pas forcément besoin » de vous rassembler pour prier ? Il juge aussi que vous n’avez pas forcément besoin d’aller dans votre résidence secondaire, ni de rendre visite à votre famille ou vos amis, ni de vous promener en forêt ou sur la plage. Pas même de bénéficier du secret médical. C’est fou, quand on tire le fil, le nombre de libertés assez superflues.pan>

À la veille de la prolongation de l’état d’urgence jusqu’au 24 juillet, cela mérite d’être médité.

Gabrielle Cluzel
Gabrielle Cluzel
Directrice de la rédaction de BV, éditorialiste

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