Alain Juppé, annonçant que, définitivement, il ne servirait pas de doublure à François Fillon, a évoqué, entre autres gentillesses, des militants LR "radicalisés".

C’est, pourrait-on dire, la réponse du berger à la bergère : « bande de radicalisés ! » Ali Juppé - puisque c’est ainsi que d’aucuns l’ont flingué - vous salue bien bas.

Ou bien un autre genre de point Godwin, aussi expéditif que le premier et qui tend à le supplanter : on compare le FN à Daech et l’on parle, désormais, de noyau dur LR « radicalisé ».

À mois que Juppé ne veuille manier, à l’instar d’Attali, la métaphore horticole et désigne ainsi la France obstinément, rageusement, solidement enracinée : les "radis"… calisés.

Quoi qu’il en soit, on le comprend à la mine amère de celui qui l’a proféré : l’adjectif n’est pas flatteur. Et il a profondément choqué. Dans les faits, ce mot-là n’est utilisé, en effet, aujourd’hui que pour désigner un seul groupe d’individus : les islamistes, ou ceux qui sont en passe de le devenir. Il suffit, pour s’en convaincre, de taper le mot "radicalisé" sur Google : sort tout d’abord le site gouvernemental pour lutter contre le djihadisme… puis viennent aussitôt les déclarations d’Alain Juppé. Voilà nos sages manifestants de dimanche - proprets retraités ou jeunes gens bien élevés - en bien improbable compagnie.

Pourtant, si l’on s’en tient à la très neutre définition du dictionnaire - qui existait bien avant que le mot ne soit promu cache-sexe de l’islamisme -, l’emploi n’est pas foncièrement déplacé : "radicaliser : rendre un groupe, son action, plus intransigeants, plus durs, en particulier en matière politique ou sociale."

Plus durs ? Soit. L’hypotonie pusillanime de la droite depuis des années, son élasticité infinie, ses contorsions de Barbapapa pour se fondre dans le moule imposé par la gauche ne pouvaient plus durer. La mollesse, il y a les caramels pour ça.

Plus intransigeants ? Il est un fait qu’ils en ont leur claque, de transiger. Ras le pompon, d’obligeamment composer - « ça va, là, j’ai bon ? Je m’écrase assez ? » Plein le dos, de céder à moitié puis, in fine, tout à fait. "On ne lâche rien", ce n’est pas faute, les gars, d’avoir prévenu.

Mais la "radicalisation", par nature, n’est pas statique. Et son mouvement n'est permis que parce que l’engrenage conscience-vote s’est mis en branle, sous l’impulsion LMPT. Les deux roues tournent sur le même pignon, l’une donne la direction à l’autre, forcément, l’attelage de droite est tout de suite beaucoup plus efficace. Mais pour aller à fond les ballons, il ne faut pas avoir peur ni être frileux. Beaucoup - comme Juppé - sont déjà cul par-dessus tête, la mine défaite, le cheveu en pétard, sur les bas-côtés. François Fillon est, pour le moment, bien accroché sur le porte-bagages - il faut dire que ceux qui ont décidé de croire en lui l’y ont ficelé presque malgré lui. De toute façon, sur quelle trottinette plus plan-plan irait-il ? Ses seuls amis sont là.

Mais qu’il ne donne quand même pas trop de coups de frein intempestifs, ou il risque de finir, lui aussi, dans le fossé.

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7 mars 2017

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