Samedi 1er avril - et ce n’était pas une plaisanterie -, le Tribunal suprême de justice (TSJ) du Venezuela, la plus haute juridiction du pays, annulait ses propres et stupéfiantes décisions prises le mercredi 29 mars qui avaient accordé tous les pouvoirs à Nicolás Maduro, mais également mis fin à l’immunité parlementaire des députés (avec la possibilité de les juger pour haute trahison) et transférer les pouvoirs législatifs au TSJ ! Julio Borges, le président de la Chambre des députés, comme une grande partie de la communauté internationale, avait dénoncé cette concentration de tous les pouvoirs : législatif, exécutif, judicaire et militaire...

Mais la dénonciation principale est venue, et ce, pour la première fois, de son propre camp, constituant un véritable coup d’arrêt aux décisions de Maduro. Vendredi 31 mars, la très influente Luisa Marvelia Ortega Díaz, procureur général du Venezuela, soulignait qu’il était de son devoir d’exprimer sa "grande préoccupation" et déclarait que la décision du Tribunal suprême constituait "une rupture de l'ordre constitutionnel", ajoutant que "plusieurs violations de l'ordre constitutionnel et de l'ignorance du modèle de l'État inscrit dans la Constitution de la République bolivarienne du Venezuela sont évidentes".

Cette déclaration solennelle, en direct sur la chaîne publique Venezolana de Televisión, dans le cadre de la présentation de son rapport annuel 2016, a fait sensation. Avocat de formation, spécialiste de droit pénal, procureur en poste depuis 2007, madame Luisa Ortega Díaz est, en effet, une cháviste de la première heure qui n’a jamais exprimé publiquement ses oppositions à l’encontre du pouvoir. Pour autant, cette fidèle de l’ancien président Hugo Chávez est aussi proche des milieux catholiques et de certains militaires. Cela pourrait expliquer cette surprenante prise de position.

Immédiatement, comme pour en souligner l’avertissement, le président vénézuélien convoquait dans une déclaration télévisée au palais de Miraflores, siège de la présidence, le Conseil de défense de la nation (CODENA), composé des cinq pouvoirs du pays (exécutif, législatif, citoyen, judiciaire et militaire). Au terme de cette réunion, dans une déclaration lue par le vice-président Tareck El Aissami, il était instamment demandé au Tribunal suprême de revoir les décisions prises "afin de maintenir la stabilité institutionnelle et l'équilibre des pouvoirs" !

Samedi 1er avril, dans un feuilleton qui pourrait ressembler à une farce politique s’il ne s’était agi de liberté et de démocratie, Nicolás Maduro annonçait un accord pour surmonter ce qu'il qualifiait de "controverse".

Une fuite en avant insensée dans un pays frappé par des problèmes sanitaires et économiques majeurs, par la pénurie des produits de base et une inflation prévue à plus de 1.600 % en 2017 !

Plus que jamais, les clefs de cette terrible sortie de crise sont dans les mains de l’armée.

Cet article a été mis à jour pour la dernière fois le 09/01/2020 à 17:55.

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03 avril 2017 à 20:18

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