Va-t-on compenser la suppression de la taxe d’habitation par la TVA ou la taxe foncière ?

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Le gouvernement avait prévu, dans un premier temps, de supprimer la taxe d’habitation pour seulement 80 % des Français. Il n’aurait eu, alors, que 10 milliards à combler, somme importante certes, mais qu’on aurait pu facilement trouver en obligeant les collectivités locales à faire des économies, en augmentant la taxe foncière et la taxe d’habitation pour ceux qui n’auraient pas été exemptés. Mais le scénario prévu par M. Macron a dérapé : le Conseil constitutionnel a déclaré qu’un impôt qui ne s’adresserait qu’à un Français sur cinq n’était pas constitutionnel, car sa base serait trop étroite, et le pouvoir a donc dû se résoudre à supprimer à terme la taxe d’habitation pour tous les contribuables.

Tout au plus les possesseurs de résidences secondaires ne seront pas concernés par cette mesure et subiront probablement une augmentation sensible de leur taxe foncière ou une taxe particulière comme celle, par exemple, qui frappe les logements vacants, ce qui devrait rapporter 2,3 milliards au Trésor. Il reste 19,4 milliards à trouver, ce qui est énorme. C’est presque le tiers du déficit actuel et il est impossible de compter sur d’hypothétiques économies pour boucher le trou ainsi créé. L’État réfléchit à des solutions pour se tirer d’affaire : il envisage de rétrocéder 12 % de la TVA, soit directement aux communes soit aux départements ; eux-mêmes donneraient leur part de taxes foncières aux municipalités. En effet, de par la Constitution, les collectivités locales doivent avoir des ressources propres et ne peuvent pas dépendre des dotations de l’État.

En fin de compte, les 19,4 milliards de perte seront supportés par le budget général. Comment combler ce trou en période de disette budgétaire ? Le pouvoir refuse de créer de nouveaux impôts et il n’instaure pas une nouvelle taxe locale à la place de l’ancienne. Il ne jouera que sur le niveau des anciens prélèvements. Il n’a guère le choix : il ne peut pas augmenter d’un tiers l’impôt sur le revenu, donc il laissera la taxe foncière exploser tout en plaçant quelques garde-fous et, surtout, il augmentera la TVA. Si elle passait de 20 % à 22 %, le tour serait joué. Néanmoins, jouer avec les taxes sur la consommation n’est pas sans risque. Augmenter la TVA est indiscutablement récessif et nuirait à la croissance. C’est une arme de dernier recours qu’on utilise lorsque aucune autre solution n’est possible.

Le gouvernement n’a donc le choix qu’entre des mauvaises solutions. L’erreur fondamentale est de vouloir supprimer la taxe d’habitation. Cet impôt est logique et utile, et aucune raison économique ne justifie de l’effacer. Le pouvoir prétend qu’il est injuste, car ses bases n’ont pas évolué depuis 1970. Il suffisait de réviser celles-ci et, pour éviter les mauvaises surprises, de lisser sur dix ans les éventuelles augmentations, les rendant ainsi invisibles. Il est encore temps de le faire : on ne reviendrait pas sur la diminution d’un tiers de la taxe d’habitation, mais on renoncerait aux suivantes et on moderniserait la taxe d’habitation. M. Macron aura-t-il le courage politique de se renier ? On peut en douter, d'autant que cette mesure était en tête de gondole de l'offre politique du candidat Macron. Les classes moyennes - une fois de plus ! -, les propriétaires paieront le prix fort de sa démagogie.

Christian de Moliner
Christian de Moliner
Professeur agrégé et écrivain

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