Durant la campagne présidentielle, Emmanuel Macron s’est ouvertement dépeint en partisan acharné de la poursuite de la construction européenne. Des intentions confirmées lors d’un discours de rentrée à la Sorbonne, où notre Président a affiché un volontarisme étonnant, voire présomptueux, ressemblant parfois à ces soviets qui prétendaient que l’URSS souffrait de n’être pas assez communiste.

Ce grand ambitieux ne se contenterait-il déjà plus de la France, trop petite ? En fixant un agenda qui pourrait conduire à l’Europe fédérale, gouvernement de la zone euro compris, Emmanuel Macron ne chercherait-il tout simplement pas à assouvir ses propres fantasmes, soit devenir le premier président de l’Europe ? Avant d’y parvenir, il devra d’abord régler un problème de taille et tenir ses engagements de campagne, en s’attaquant au problème du travail détaché.

"C’était un des sujets clés utilisés par le Front national dans la campagne française. Les populistes utilisaient la très mauvaise régulation européenne", a déclaré Emmanuel Macron lors de son discours de clôture du sommet européen. Lundi 23 octobre, dans la soirée, à l’issue de négociations ultra-rapides, un accord aurait été trouvé sur la réforme de la directive du travail détaché. Emmanuel Macron n’a pas attendu longtemps pour s’en réjouir bruyamment, parlant d’une victoire essentielle pour "recréer la confiance européenne". Il est vrai que, parmi les vingt-huit pays de l’Union, seuls quatre se sont opposés : la Pologne, la Hongrie, la Lettonie et la Lituanie. Le cercle dit de Visegrád s’est donc fragmenté. À l’identique, Portugal et Espagne ont surpris en se déclarant favorables à la réforme.

Maintenant, analysons les faits d’un peu plus près et posons-nous la question suivante : comment des pays qui n’y avaient pas intérêt - à commencer par l’Allemagne, dont le patronat dépend des travailleurs détachés dans de nombreux secteurs - ont-ils pu accepter un tel accord ? Tout simplement parce que ledit accord est très largement insuffisant, ne remettant pas en question le principe du travail détaché, qui sera limité à douze mois, et, pour ce qui concerne le transport routier, se contentant de continuer à appliquer aux chauffeurs l’ancienne directive de 1996. Quand on sait que la majorité des contrats de travail détaché sont courts, le plus souvent intérimaires, on est en droit de se demander si tout cela n'est pas une farce. En outre, le principe de paiement des charges sociales du pays d'origine pour les travailleurs détachés sera maintenu. Soit ce qui pose vraiment problème !

Députée française au Parlement européen élue sur une liste du Front national, j’espère que la directive sera purement et simplement abrogée. Bien sûr, soucieuse du bien commun, je voterai favorablement la révision si le texte définitif présente suffisamment de garanties pour les travailleurs français, suffisamment d’avancées. N’oublions pas que le défi principal auquel nous faisons face est bien la philosophie qui sous-tend le marché unique, c'est-à-dire le principe de concurrence libre et non faussée. En limitant la durée du travail détaché à douze mois, plus six mois supplémentaires en option, nous ne supprimerions pas la concurrence déloyale qui s’exerce sur un grand nombre de travailleurs français, notamment dans le bâtiment ou les services saisonniers. Il faut aller plus loin !

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24 octobre 2017 à 19:03

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