À 69 ans, Dominique Strauss-Kahn s’est marié pour la quatrième fois. C’est, sans aucun doute, le signe d’un tempérament optimiste, car on n’imagine pas qu’à son âge, les parents de la dame aient exigé une "régularisation" de leurs amours coupables.

Les jeunes mariés vivent en exil : ils résident à Marrakech, dans un riant riad. Ce n’est pas cher, le Maroc, et puis, le petit personnel y est encore dévoué, bon marché, et peu au fait des gamelles qui tintent aux basques de nos grands hommes. Les plats à tajine sont moins bruyants que les casseroles.

DSK, donc. L’homme de gauche qui déclarait, en 2010 : « À partir de 1972, je vois [économiquement] que le communisme ne tient pas la route. » Ça s’appelle prendre le temps de la réflexion…

Parce que DSK (je m’adresse aux jeunes qui l’ignorent) est une tête en économie. Comme Hollande, il l’a enseignée : à l’IEP, à l’ENA, à HEC…

C’est lui, DSK, le secrétaire national du PS chargé des programmes économiques, puis le président de la commission des Finances à l’Assemblée, le ministre délégué à l’Industrie et au Commerce extérieur sous Mitterrand, l’auteur du programme économique de Jospin, le père des 35 heures, puis le puissant ministre de l’Économie, des Finances et de l’Industrie. Brillante ascension jusqu’à ce que le scandale de la MNEF le rattrape, de même que l’affaire de "la cassette Méry".

La Justice évoque alors de « fortes présomptions de faits de corruption passive à l'encontre de l'ex-ministre ». Finalement, la Cour de justice de la République ne sera pas saisie, le procureur général estimant qu’il manque "les indices pour justifier une saisine de la CJR du chef de concussion". Ça n’est pas passé loin… Inquiété, aussi, dans l’affaire Elf, sa rivale Ségolène Royal déclarera que les politiques sont là « pour servir et pas pour se servir ».

Mais c’est pour d’autres turpitudes que DSK va tomber : son addiction au sexe. Nommé directeur général du FMI, le 28 septembre 2007 (rémunération de 530.000 dollars nets d’impôts), il commence par s’opposer à la taxe Tobin (taxation sur les transactions monétaires internationales). Puis il se prend les pieds dans les porte-jarretelles et les soutiens-gorge pour finir menotté à la sortie du Sofitel New York le 14 mai 2011. Arrêté alors qu’il prenait l’avion à JFK, il est accusé d’avoir agressé une femme de chambre. Ce sera le feuilleton graveleux de la fin d’année 2011, les accusations se multipliant jusqu’à l’autre affaire de fesses, celle du Carlton de Lille où il a trempé avec son copain Dédé la Saumure.

Et voilà que, semblable à son vieux camarade François Hollande qui fut élu plus miraculeusement qu’Emmanuel Macron, et Ségolène Royal, qui fut aussi sa rivale, DSK fait un retour. Il a lancé, le 3 décembre, un nouveau « club de réflexion ». Ça s’appelle Le Lieu. Le lieu où l’on pense, où l’on réfléchit. Le lieu où des gens qui nous ont conduits là où l’on s’enfonce aujourd’hui se proposent de nous mitonner un avenir radieux, forcément.

Il y aura là-dedans « des intellectuels, des syndicalistes mais aussi des économistes et autres dirigeants d'entreprises ». Leur objectif : « Définir des futurs grands thèmes de société et ainsi réfléchir sur les orientations du monde à l'horizon 2025-2050. »

On ne nous le dit pas, mais j’imagine que ceux qui s’y pressent « par cooptation » doivent avoir d’illustres parrains. Que dans ce lieu « d'élaboration collective d'un projet réformiste », on va retrouver nos penseurs habituels : Attali, sans aucun doute, et certainement aussi Alain Minc. Bref, tout ceux qui nous ont mis dans la m…

Il l’a dit, pourtant, DSK : « Rien ne m'agace plus que le maintien de sexagénaires qui ont du mal à quitter la scène. » Mais ces gens-là sont comme le sparadrap du capitaine Haddock : impossible de s’en débarrasser. Ils ne connaissent pas la honte. Nous, si.

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06 décembre 2018 à 17:32

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