Les vacances risquent d’être courtes pour Emmanuel Macron, entre affaire d’État (Alexandre Benalla) et affaires d’été avec Theresa May. Ainsi, madame le Premier ministre britannique a-t-elle rejoint, ce week-end, le premier des Français dans sa résidence de Brégançon. Au programme des réjouissances : le sauvetage du Brexit et un peu celui de l’Europe, aussi.

Actualité oblige, elle n’est pas véritablement en position de force ; lui non plus. Pas plus que les autres protagonistes de ce qui se joue actuellement en coulisses, d’ailleurs. Jeremy Hunt, nouveau chef de la diplomatie anglaise, très affaibli par les démissions des deux poids lourds du gouvernement, son prédécesseur Boris Johnson et David Davis, jusque-là chargé du Brexit, était à Paris ce mardi dernier, pour tenter de négocier un accord commercial entre Union européenne et Royaume-Uni. Mais sur quelles bases ?

Car, de son côté, Michel Barnier, représentant de cette même Union européenne, n’est guère pressé de négocier, surtout des propositions du gouvernement de Theresa May, qui verraient des droits de douane imposés par l’Angleterre aux produits destinés au marché européen, mais droits qui auraient ensuite vocation à être restitués à cette même Europe. Tout en tenant compte des spécificités irlandaises. Si même Michel Barnier trouve ça compliqué…

D’où cette tentative de diplomatie parallèle menée par le 10 Downing Street, grâce à laquelle Theresa May tente de passer par-dessus la tête de Bruxelles et de Strasbourg, en s’en allant parler directement d’homme à homme avec les divers chefs d’État concernés. Un Donald Trump n’aurait pas mieux dit et mieux (ou mal) fait. Alors qu’elle part à Brégançon, le nouveau ministre du Brexit, Dominic Raab, revient de Paris, où il s’est entretenu avec Nathalie Loiseau, ministre chargée des Affaires européennes. Dans le même temps, c’est Jeremy Hunt qui se rend en Autriche rencontrer son homologue Karin Kneissl, ainsi que le chancelier populiste Sebastian Kurz.

Le problème, c’est que toutes ces personnes ont en commun de chercher leurs propres marques : les unes veulent se faire leur place en Europe et les autres tentent d’en sortir la tête plus ou moins haute.

Pour sir Peter Forbes Ricketts, ancien ambassadeur britannique en France, cette diplomatie parallèle serait « peine perdue », à en croire Le Figaro : "Il y a très peu de chances que Theresa May obtienne quelque concession de la part du Président français." Ce, d’autant plus qu’on ne sait plus très bien ce qu’il convient, aujourd’hui, de sauver. L’avenir de la construction européenne ? Ses piliers français et allemand ne sont pas au mieux. L’Italie, autre nation fondatrice, professe un euroscepticisme des plus virulents, au même titre que la majeure partie des nouveaux arrivants, les pays d’Europe de l’Est. Quant à l’Angleterre, la question ne consiste plus à savoir si elle va rester ou non en Europe, mais de quelle manière elle pourra en sortir. Les bonnes relations avec l’Angleterre, alors ? Europe ou non, elles devraient continuer à être bonnes et mauvaises, selon la météo politique du moment.

De son côté, Berlin ne dévoile pas encore son jeu, même si L’Humanité, reprenant des informations du Guardian, nous révèle ces quelques informations pas exactement anodines : "Angela Merkel pourrait chercher à offrir à Theresa May, très affaiblie dans son propre camp et dans tout le Royaume-Uni, une version inédite du Brexit : le “Brexit aveugle”. Soit un accord très vague qui permettrait d’éviter une sortie de l’UE […] renvoyant à plus tard la résolution des questions épineuses, et permettant aux dirigeants européens de sauver la face."

C’est-à-dire qu’une fois de plus, l’oligarchie dominante ferait comme si les aspirations populaires n’étaient que quantité négligeable. Ce ne serait pas la première fois. Emmanuel Macron et Theresa May devraient pouvoir en parler tranquillement et au frais. Il paraît qu’on vient d’installer une toute nouvelle piscine à Brégançon.

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03 août 2018 à 21:13

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