En 1895, date du dernier recensement turc, la Palestine était très peu peuplée : 69.000 juifs, 52.000 chrétiens et 105.000 musulmans : un tiers de juifs, un quart de chrétiens, moins de la moitié de musulmans[ref]Vital Cuinet, La Turquie d'Asie, éditeur Ernest Leroux, Paris, 1896[/ref].

La population s'est ensuite accrue, en partie par les immigrants juifs, en partie par des immigrants musulmans venants des pays voisins et attirés par le développement économique provoqué par les Juifs, et en partie par une explosion démographique.

Quelle proportion des Palestiniens actuels descend des premiers habitants, et quelle proportion descend des immigrants musulmans ? Pour le savoir, il faut tenir compte de la croissance démographique des musulmans : 1,3 % en 1895 d’après les recensements turcs, 2,5 % en 1935 d’après les statistiques anglaises. La moyenne de ces deux chiffres, 1,9 %, surestime la population musulmane, car l’augmentation de taux s’est produite à la fin de cette période. Les musulmans de 1895 étaient 105.000, dont 5.000 immigrants arrivés entre 1870 et 1895, soit 100.000 habitants dont les parents avaient habité ce pays avant l’arrivée des immigrants juifs. Un taux de 1,9 % de 1895 à 1948 fait passer de 100.000 à 270.000. De ce nombre, il faut déduire les Turcs nombreux en Palestine en 1895, et qui ont quitté le pays à la fin de la Première Guerre mondiale, lors de l’effondrement de l’Empire turc. Leur nombre n’est pas connu, et aucune donnée chiffrée ne permet de procéder à une estimation. Gardons simplement en mémoire le fait que cela va conduire à surestimer la proportion de Palestiniens descendant des premiers habitants, qui est déjà surestimée par l’usage d’une moyenne de taux de natalité.

En 1948, d’après les relevés de l’ONU, il y avait, au moment de la proposition de partage du pays, 497.000 musulmans dans l’État juif proposé, et 725.000 dans l’État arabe proposé, soit au total 1.222.000. Sur ce nombre, moins de 270.000 descendaient des premiers habitants musulmans : il faudrait soustraire de ces 270.000 les Turcs, ce qui n’est pas possible faute d’information, et tenir compte du fait que l’usage d’une moyenne suppose que la natalité s’est régulièrement accrue depuis 1895 jusqu’à 1948, alors qu’en fait, elle s’est accrue essentiellement dans les dernières années avant 1948. Moins de 270.000 sur 1.222.000, cela fait environ 20 % : les quatre cinquièmes des Palestiniens actuels n’ont pas plus le droit de se voir attribuer une partie de la Palestine que les immigrants maghrébins d’aujourd’hui n’ont de droit à se faire attribuer une partie de la France, les immigrants turcs une partie de l’Allemagne, les immigrants pakistanais une partie de l’Angleterre, les immigrants mexicains une partie des États unis. On peut, certes, dire la même chose des descendants d’immigrants juifs qui peuplent aujourd’hui Israël, mais cela signifie que l’on ne peut tirer aucun argument du fait que la plupart des Israéliens actuels sont des descendants d’immigrants : à hauteur de 80 %, les Palestiniens sont dans le même cas.

Les immigrants arabes ancêtres des Palestiniens actuels ont demeuré dans ces territoires pour l’essentiel entre 1920 et 1948, une petite trentaine d’années pour les plus longs résidents, alors que 20 % environ de la population juive s’y trouve depuis plus d’un siècle, et la majeure partie des autres 80 % depuis plus de 60 ans.

Cet article a été mis à jour pour la dernière fois le 09/01/2020 à 20:38.

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22 décembre 2017 à 13:12

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