Les honneurs de la République accordés à Mamoudou Gassama et la promotion de Kiddy Smile lors de la soirée de la fête de la Musique à l’Élysée avaient déjà donné un avant-goût de l’indulgence d’Emmanuel Macron envers des comportements réprimés par la loi, du moment qu’ils étaient le fait de jeunes gens talentueux issus de la diversité.

L’épisode Alexandre Benalla en est une manifestation de plus. Impulsif, le jeune garde du corps du PS avait déjà pas mal d’incartades à son actif, au point que le ministre de l’Intérieur lui avait refusé par deux fois le port d’armes en 2013 puis en 2017.

Mais une fois Macron élu, tout fut oublié. Chargé de la sécurité du Président, grassement rétribué, élevé au grade de lieutenant-colonel, le jeune colosse est partout : dans la manifestation du 1er mai, dans le bus des Bleus lundi dernier à Roissy, sans égards excessifs pour les remarques des policiers ou gendarmes qui douteraient de la légalité de sa présence ou pour les réticences du préfet à l’adresse duquel il lance « le préfet, je l’emmerde ! »

Chargé de la réforme du GSPR (Groupe de sécurité du président de la République), il est très vite soupçonné de piloter, en réalité, une « équipe parallèle », sorte de « secret service » présidentiel à l’américaine, dont il serait le seul patron.

Alors, Benalla, ce serait OSS 117, finalement ?

Pire ! La rumeur enfle. L’Algérie patriotique, site à la fiabilité incertaine mais relayé par la tweetosphère, du 20 juillet, titre que "Lahcene Benahllia" – ce serait son vrai nom, d'après ce site - est un agent de la DGED (services secrets marocains) « introduit dans les rouages du PS par Najat Vallaud-Belkacem ».

C’est dans ce contexte qu’à l’Assemblée nationale, le député LR Christian Jacob suscite l’indignation de ses collègues en dévoilant que Benalla « est en possession d’un badge pour entrer dans l'Hémicycle ».

Que le Président ait usé déjà deux fois de la possibilité de violer le sacro-saint narthex du temple de la République en venant faire un discours au Congrès ouvert par la révision constitutionnelle de 2008 est déjà mal vécu.

Qu’il demande à pouvoir, à l’avenir, y répondre aux questions dans la révision actuellement en discussion contrarie nombre d’élus.

Que, maintenant, son garde du corps, promu chef de sa garde rapprochée, puisse y avoir accès aussi, la coupe est pleine !

Sommé de s’expliquer, Christophe Castaner, réfugié à la Buvette, s’y refuse obstinément, ce qui met le comble à l'exaspération des députés. Le vendredi 19 juillet, l’Assemblée est le cadre d’un de ces tohu-bohu monstres dont la Troisième République avait le secret.

Mélenchon, dejà irrité de se faire devancer par Macron dans la défense de la diversité et de la cause décoloniale, demande de suspendre les débats sur la révision, qu’il qualifie de « coup d’état institutionnel de l'exécutif contre le Parlement », et annonce le dépôt d’une motion de censure.

Samedi, l’émotion est telle qu’une "info" du site parodique belge Nordpresse selon laquelle le général Pierre de Villiers aurait dit à l’antenne de BFM TV « J’ai dû donner les codes nucléaires à Alexandre Benalla dès ma première rencontre avec lui… » est prise pour argent comptant par une partie des internautes, et même par un député LR. Et quand @KarimOuchick tweete, à 22 h, « selon une source sûre #AlexandreBenalla disposait aussi d’autorisations d’accès au pas de tir de la fusée Ariane, aux coffres-forts de la Banque de France et au PC nucléaire souterrain de Taverny », au lieu des smileys souriants qu’il attendait, il reçoit en retour des mails affolés.

C’est à madame Belloubet, garde des Sceaux, qu’est donné l’ordre de calmer le jeu. Elle annonce à l’heure du déjeuner dominical qu’« afin que revienne la sérénité dans une Assemblée nationale très agitée depuis jeudi soir les débats sur la révision constitutionnelle sont suspendus.Les débats reprendront lundi à 16 h… sur le projet de loi sur la vie professionnelle qui viendra en discussion. »

Quand, ensuite, Francois de Rugy articule « La séance est levée », on s’attend presque à ce que les députés, comme après le « ite missa est », crient « Deo gratias ».

Ouf, le couperet n’est pas passé loin !

Car, le saviez vous ? La révision impose la diminution d’un tiers du nombre d’élus nationaux. Rien que ça ! Un report aux calendes grecques est donc le bienvenu. S’auto-saborder, c’est pas le genre des Assemblées.

N’est pas un noble de la nuit du 4-Août qui veut…

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24 juillet 2018 à 12:07

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