Alors que l’émotion reste tangible dans les rues de la capitale alsacienne, l'inhumation de Chérif Chekatt suscite débat et controverse au sein de la municipalité, qui semble revenir sur la fermeté affichée en début de semaine.

Le premier adjoint au maire de Strasbourg avait pourtant donné le ton dès lundi : « la sépulture du terroriste n’a pas sa place ici » .On ne pouvait pas être plus clair… Le maire de Strasbourg, Roland Ries, avait même enfoncé le clou en déclarant aux Dernières nouvelles d'Alsace : "Personnellement je suis plutôt hostile, sinon réticent à son inhumation à Strasbourg.(…) Un type qui a assassiné cinq personnes, je pense que c’est pour moi un problème de lui accorder l’inhumation à Strasbourg."

On allait voir ce que l’on allait voir de la part d’un maire, qui tout socialiste qu’il est, semblait pourtant bien décidé à prendre ses responsabilités. Et voilà que notre matamore de la capitale alsacienne baisse la garde, envisage de revenir sur une position pourtant affichée haut et fort, avant que le père du terroriste ne se présente à la mairie de Strasbourg, précisant qu'il comptait demander le rapatriement du corps de son fils en Algérie. "Il fallait qu'il obtienne des actes de décès. Il nous a indiqué qu'il allait demander au consulat d'Algérie un rapatriement du corps de son fils", a indiqué Roland Ries à l’AFP. "À condition que l'Algérie l'accepte, le corps sera transféré et ce serait pour moi la solution la plus simple", a-t-il ajouté.
Mais comme c’est prévisible, si l’Algérie n’en veut pas ? "Si pour une raison ou pour une autre, cela ne marchait pas, si l'Algérie ne l'acceptait pas par exemple, la possibilité d'avoir une sépulture anonyme, sans médiatisation, pourrait être une solution", a-t-il ajouté. Ben voyons ! 

Ce revirement est d’autant plus incompréhensible, qu’une récente jurisprudence du conseil d’Etat permet dorénavant à un maire de refuser l'autorisation d'inhumation dans un cimetière communal. La plus haute juridiction administrative a estimé, en effet, en décembre 2016, qu'en vertu de ses pouvoirs de police, le maire pouvait s'opposer à une inhumation, si celle-ci risquait de troubler l'ordre public et la tranquillité de la commune : « pour prévenir les troubles à l’ordre public que pourrait susciter l’inhumation dans un cimetière de la commune d’une personne qui a commis des actes d’une particulière gravité (…)le maire peut légalement refuser l’autorisation d’inhumation ».

Le Conseil français du culte musulman (CFCM) presse la ville de Strasbourg à inhumer "le plus rapidement possible" et "dans l'anonymat" Chérif Chekatt, pour "éviter d'en faire une victime". On croit rêver... Comme pour le maire de Strasbourg, on aurait aimé de la part des autorités musulmanes une réaction plus courageuse, à l’image de celle, en 2016, de l’imam de la mosquée de Saint-Etienne-du-Rouvray qui avait fait savoir, après le lâche attentat contre le Père Joseph Hamel, qu’il s’opposerait à une inhumation d’Adel Kermiche dans l’un des deux carrés musulmans de la ville. « On ne veut pas salir l’islam avec cette personne », avait-il déclaré à l’AFP. Et de préciser : « Nous ne participerons ni à la toilette mortuaire, ni à l’inhumation dans l’hypothèse où elle serait réclamée par la famille.»

En 2011, avait alors écrit 20 minutes, les États-Unis avaient opté pour un choix radical après la mort de Ben Laden : jeter son corps à la mer pour éviter que sa sépulture ne devienne un lieu de recueillement. Une solution totalement contraire au droit français, hélas…

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20 décembre 2018 à 18:14

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