"Nous créerons un service militaire obligatoire et universel d’un mois" : c’était écrit en gras dans le projet présidentiel d’Emmanuel Macron. Il n’y a pas un an. Dans son discours sur les questions de défense, le 18 mars 2017, le candidat Macron, solennel, grave, presque présidentiel, prononçait des mots définitifs sur cette question du service militaire : "C’est là un projet de société majeur, un véritable projet républicain… J’ai pris cette décision [on notera le style régalien] compte tenu du défi qui est aujourd’hui le nôtre. C’est un défi de sécurité, d’éducation, un défi économique et social mais c’est aussi un défi moral et de civilisation." Fermez le ban.

Et vendredi dernier, le ministre des Armées Florence Parly déclarait, au micro de France Inter, que ce service ne serait "probablement pas obligatoire, au sens où les gendarmes viendraient rechercher le réfractaire". Visiblement, on n’enverra pas la maréchaussée pour relever le défi de civilisation.

Il est vrai qu’entre-temps, des rapports ont été remis aux autorités gouvernementales. Le Conseil d’orientation des politiques de jeunesse (COJ), dans un document remis au ministre de l’Éducation nationale, a préconisé de ne pas rendre ce service obligatoire et ce, afin d’éviter une rupture dans les parcours scolaires, professionnels ou personnels. Argument intéressant qui laisse entendre qu’il y aurait ceux qui peuvent supporter une rupture d’un mois et les autres. En toute cohérence, ces mêmes rapporteurs préconisent-ils aussi d’abolir le principe d’égalité ?
Les inspections générales (administration, finances, armées, éducation, jeunesse et sports) ont rendu, la semaine dernière, un rapport, commandé en septembre par le Premier ministre. Rapport qui émet des doutes sur la faisabilité de ce service, notamment pour des questions de coût (2,4 à 3 milliards d’euros par an), d’hébergement et d’encadrement. Incorporer, habiller, nourrir, héberger, former, encadrer toute une classe d’âge (600.000 jeunes environ, soit 50.000 tous les mois si on étale ce service sur toute l’année) est effectivement un défi, peut-être pas de civilisation, mais un défi de taille.

Il y aurait donc comme une petite différence entre la promesse de campagne et ce qu’il se projette sur cette question du service militaire ? "Sur tout, je fais ce que je dis. C’est en effet assez nouveau", déclarait, dominateur et sûr de lui, Emmanuel Macron lors de son interview à TF1 et LCI, le 15 octobre 2017. Sur tout ? La question du service militaire semble nous apporter la preuve flagrante que non. Et que, sous les atours d’une prétendue compétence, une bonne partie du programme d’Emmanuel Macron n’aura été qu’improvisation, approximation et incantation. Sauf sur le coup de la CSG, soyons honnêtes !

Ce service devait être militaire et pas seulement « civique », comme celui que François Hollande avait promis durant sa campagne et qu’il avait remis sur le tapis lors de ses vœux à la jeunesse en janvier 2016, annonçant même un budget d’un milliard "d’ici 2018". Une promesse de précampagne, en quelque sorte… Macron, lui, voulait un truc militaire, on ne pouvait être plus clair : "Au travers d’une expérience directe de la vie militaire, de ses savoir-faire et de ses exigences, chaque jeune Français ira ainsi à la rencontre de ses concitoyens", expliquait-il, le 18 mars 2017.

Or, que nous dit aujourd’hui Athéna-Parly ? "Ce sera un service qu’on cherchera à rendre attractif pour les jeunes afin qu’ils soient incités à le réaliser, à la fois pour eux-mêmes, pour ce qu’ils y apprendront et aussi pour ce qu’ils pourront donner aux autres." On dirait du Hollande dans le texte. Plus flou, on fait pas.

Ce service militaire d’Emmanuel Macron - pas celui qu’il n’a pas fait, mais celui qu’il a promis aux Français -, ça partait, sabre au clair, comme à Arcole. Pour terminer au clair de lune, comme la 7e compagnie ?

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11 février 2018 à 20:03

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