Retour de la messe en latin : la tradition a encore de l’avenir !

Qui l’eût cru, mais la messe traditionnelle en latin connaît désormais un retour en grâce inattendu, depuis qu’à la faveur d'un motu proprio, le pape Benoît XVI en a officialisé le retour en nos églises, il y a maintenant dix ans.

Depuis, la messe de saint Pie V est régulièrement célébrée dans 230 lieux de culte, sans compter ceux appartenant à la mouvance lefebvriste. Par rapport au treize mille églises de France, le chiffre peut paraître modeste, à ce détail près que le nombre de ces offices traditionnels a quasiment doublé depuis 2007.

Autre fait marquant : l’âge moyen des fidèles est en baisse constante, indication à mettre en corrélation avec ces 20 % de prêtres frais émoulus, formés au séminaire selon le missel d’avant le concile de Vatican II. Comme quoi la tradition semble avoir de l’avenir devant elle et faire plus recette auprès des petits que des grands. Décidément, la modernité n’est plus ce qu’elle était…

Et l’AFP de signaler : "Vicaire épiscopal pour l’usage de la “forme extraordinaire du rite romain” à Paris, Monseigneur Patrick Chauvet rappelle que la messe ancienne n’a pas le monopole du latin et qu’en sa cathédrale Notre-Dame, une “messe Paul VI”, donc “ordinaire”, est chantée en grégorien chaque dimanche." Comme quoi la concurrence n’a pas forcément que de mauvais aspects.

De quoi hérisser la tonsure des calotins progressistes. D’où l’indignation de Christian Delahaye, journaliste et théologien, qui dénonce "une démarche vraiment identitaire" : "Ils vous disent que “c’est la messe de toujours”, mais en fait, c’est un retour à la messe du Moyen Âge, pour ne pas dire un repli moyenâgeux…" Faut-il rappeler à ce monsieur que la codification de cette messe « moyenâgeuse » remonte au concile de Trente – qui n’était pas une réunion de trente personnes, malgré un intitulé trompeur ? Et que ce concile, convoqué le 12 mai 1542 avant de se clore le 4 décembre 1563, n’avait donc rien de médiéval, puisque tenu afin de contenir l’hérésie protestante. Bref, si Christian Delahaye est théologien, moi, je suis danseuse-étoile.

D’ailleurs, à propos de tradition, ne sont-ce pas les mêmes qui, dans les années soixante-dix, entendaient vivre leur foi comme jadis les chrétiens des catacombes, soit quelques siècles avant ce même Moyen Âge ? Au nom du progressisme, il va sans dire. Les mêmes encore qui, toqués d’universalisme, voulaient bazarder la langue liturgique universelle de l’Église - le latin ? Et qui, reprochant au catholicisme ses crispations et son repli présumés, oubliaient que le mot "catholique" signifie justement "universel". Une universalité incarnée par ce latin qu’ils refusent à l’Église, alors qu’ils l’acceptent volontiers dans le monde des affaires, monde dont la langue universelle n’est autre que l’anglais… Le progrès, c’est bien. La cohérence, ce n’est pas mal non plus.

Jusqu’il y a peu, les catholiques priaient en latin, alors que les musulmans continuent de le faire en arabe, car c’est le propre d’une religion universelle d’avoir une langue universelle, même si les sermons sont dits en langue vernaculaire, tel que cela s’est toujours fait. Il est donc heureux, et il n’y a guère qu’un Christian Delahaye et autres vieux plumeaux réactionnaires pour déplorer que l’Église catholique puisse enfin récupérer l’un de ses trésors les plus précieux, cette langue commune permettant de mieux communier ensemble.

Il y en a vraiment certains qui cultivent la haine du bonheur. Les pauvres doivent aujourd’hui souffrir le martyre, condamnés qu’ils sont à prier en langue des signes, tant les grandes douleurs sont muettes.

Nicolas Gauthier
Nicolas Gauthier
Journaliste à BV, écrivain

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