Présidence jupitérienne ? Toujours est-il que les forces de l’ordre - cinq cents gendarmes, excusez du peu - ont évacué la ZAD de Bure, dans la Meuse. Et Gérard Collomb, ministre de l’Intérieur, d’annoncer :

Sous l’autorité de la préfète de la Meuse, une opération menée par la gendarmerie a débuté ce matin à 6 h 15 visant à mettre fin à l’occupation illégale du Bois-Lejuc, site destiné au projet d’intérêt national Cigéo.

La « préfète » ? Un peu comme le gendarme et ses « gendarmettes », si chères à Louis de Funès ? Il y a de ça, sachant qu’avec l’inspecteur Columbo, ça ne rigole pas et que force doit rester à la loi.

Au fait, qu’est-ce que ce « projet d’intérêt national » du nom de Cigéo ? Tout simplement celui de l’enfouissement de déchets nucléaires qui seront radioactifs durant les cent mille prochaines années ; comme quoi, s’il y a des périls immédiats, il existe aussi des dangers à long terme. Assez logiquement, il y a des résistances locales : qui voudrait de ces 85.000 m3 de cochonneries enterrés au fond de son jardin ou dans la forêt d’à côté ?

Incidemment, c’est toute la problématique de l’énergie nucléaire, l’un des fleurons de l’industrie française, certes, qui se trouve une fois encore remise en cause. Indépendance énergétique ? Cela serait vrai si l’uranium nécessaire était extrait en France. Il l’est à l’étranger ; indépendance stratégique relative, donc. Énergie propre ? Si tel était le cas, la question de l’enfouissement des déchets ne se poserait pas.

D’ailleurs, la question nucléaire n’a jamais véritablement été publiquement mise sur la table ; à l’instar de tant d’autres, tout aussi cruciales, par ailleurs. Entre opacité du lobby nucléaire à laquelle répondent trop souvent les élucubrations d’écologistes exaltés, ce débat pourtant vital a, de fait, été avorté bien avant terme.

Après, une autre question : celle de l’ordre public. Que le plutôt sympathique Gérard Collomb le rétablisse, fort bien. Ce, d’autant plus qu’il est plus facile de le faire régner face à des paysans et des villageois, même si viennent s’y mêler quelques trublions d’extrême gauche, que dans d’autres zones elles aussi données pour être de non-droit. En effet, la jungle de Bure est autrement moins périlleuse que celle de Calais. Tout comme pour nos amis les pandores, il sera toujours plus aisé de persécuter l’automobiliste solvable le long des routes que le dealer, généralement plus fortuné mais moins solvable, de ces autres jungles que sont devenues certaines cités.

Traditionnellement, les fonctions régaliennes de l’État consistaient à protéger le faible contre le fort. L’évolution des élégances républicaines étant ce qu’elle est devenue, les actuelles tendances emprunteraient désormais la tendance inverse. D’ailleurs, taper sur le plouc périphérique de la Meuse n’engage à rien, si ce n’est à éventuellement grimper dans les sondages. Et si ces déchets sont si inoffensifs qu’on veut bien nous le dire, que ne les enfouit-on pas à Paris, dans le Marais, ou sous ces incubatrices de start-up, généralement sises dans ces métropoles « qui gagnent » et peuplées de "gens qui réussissent", au contraire de ceux "qui ne sont rien", si chers à Emmanuel Macron ?

En attendant, il paraît que l’ordre règne à Bure.

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22 février 2018 à 13:37

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