C'est Sacha Houlié, jeune député LREM de la Vienne, qui a lancé le ballon ce 2 janvier. Toute la Macronie s'est remise en marche derrière son chef, avec une ambition : reprendre la main face aux gilets jaunes. Et les prendre au mot : on ne jure plus que par le RIC ? Éric Drouet est devenu la star des plateaux ? Eh bien, on va doubler les gilets jaunes sur ce terrain : "L'exécutif étudie la piste d'un référendum" à l'issue du grand débat.

Ce serait donc un référendum à questions multiples. Immédiatement, le député LREM a circonscrit ces questions aux modifications voulues par Emmanuel Macron lui-même et promises pendant sa campagne :

"Faut-il réduire le nombre de parlementaires ? Faut-il introduire une dose de proportionnelle ? Faut-il instaurer le vote blanc ? Faut-il instaurer un non-cumul des mandats non plus entre une fonction exécutive locale et une fonction parlementaire mais maintenant dans le temps, trois mandats maximum pour tous ?"

Pour Sacha Houlié, le grand débat national n'a pas commencé mais il sait déjà les questions qu'il faudra poser au peuple. D'ailleurs, l'immigration, pourtant présente dans l'allocution présidentielle du 10 décembre, a été, le lendemain, déclarée hors sujet. De quoi douter davantage, au passage, de la parole du Président. Sera-t-elle de retour dans la Lettre aux Français qui nous est, aussi, annoncée aujourd'hui ?

La tactique du référendum est habile : elle permettrait au Président et à la majorité de contourner, une fois de plus, les parlementaires, d'affaiblir encore l'opposition et de se prévaloir d'un oui à un référendum. Tout en feignant de satisfaire l'une des revendications majeures des gilets jaunes.

En effet, qui irait ergoter sur la dose de proportionnelle ? Le nombre exact de parlementaires ? Car Sacha Houlié l'a avoué, sur ces questions-là, l'assentiment populaire est massif :

"Je fais partie de ceux qui estiment que si ces mesures sont plébiscitées par les Français, et je crois qu’elles le sont, hé bien on doit pouvoir se poser la question de dire : “Demandons-leur leur avis”."

L'opération présente tout de même un certain nombre de risques. D'abord, si ce référendum que l'on nous fait miroiter le 2 janvier n'advient jamais. Ensuite, si le peuple commence à sentir que c'est, en fait, le macronisme qui cherche à s'imposer par ce biais et à retrouver une légitimité qu'il a perdue en 2018 : questions soigneusement limitées, conséquences de la réduction du nombre de parlementaires sur la représentation des zones rurales ou périphériques sacrifiées au profit des grandes métropoles. "On ne bâtit rien sur des mensonges", a dit le Président lors de ses vœux. La leçon vaut d'abord pour lui.

Le piège est, en effet, grossier. Le peuple s'est senti floué sur les questions fiscales et environnementales. S'il sent qu'on cherche, après cela, à lui faire valider les projets institutionnels d'Emmanuel Macron et, surtout, à lui redonner une onction populaire perdue, il pourrait, surtout face à un Président très impopulaire, être tenté de lui répondre non massivement, quelles que soient les questions.

Et ce ne serait pas une "foule haineuse" qui aurait crié, mais le peuple qui se serait exprimé.

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02 janvier 2019 à 16:59

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