Seconde adaptation du roman autobiographique de Romain Gary, après celle de Jules Dassin en 1970, La Promesse de l’aube, d’Éric Barbier, est sortie le 20 décembre dernier au cinéma. Le réalisateur, on s’en souvient, s’illustra une première fois en 2006 avec Le Serpent, petit thriller méconnu mais très bien ficelé avec lequel il faisait déjà preuve de solides trouvailles de mise en scène et d’une parfaite direction d’acteurs.

De son propre aveu, le scénario de La Promesse de l’aube ampute des deux tiers le récit d’origine. Néanmoins, le réalisateur entend en restituer l’esprit, la tonalité générale, dans un mélange de confessions mélancoliques et d’aventures romanesques savamment rythmées.

Ainsi, le film prend la forme d’un long flash-back rétrospectif de la jeunesse de Romain Gary – qui n’est encore, à cette époque, que Roman Kacew –, petit juif polonais ayant grandi sans père, encombré d’une mère étouffante, castratrice (Charlotte Gainsbourg, mémorable !), un brin comédienne et prête à tout pour que son fils devienne quelqu’un : un ambassadeur, un général ou même un artiste, pourvu qu’il ne s’agisse d’un peintre torturé comme le fut Van Gogh en son temps… L’idéal serait même de concrétiser en France ces aspirations, pays que révère Nina Kacew.

Mue par un instinct de survie peu commun, une culture certaine de la revanche et un culot monstre, celle-ci quittera donc la Pologne et la misère avec son jeune fils pour le soleil de la Côte d’Azur où, très vite, se consolidera sa situation sociale, jetant alors les bases nécessaires à l’accomplissement futur de Romain Gary.

Avec un humour bienveillant mêlé de tendresse, Éric Barbier nous conte deux heures durant les exploits d’un fils disposé à répondre favorablement aux attentes d’une mère absolutiste et exigeante, allant jusqu’à tenter, pour la rendre fière, d’assassiner Hitler – avant de se raviser la veille du départ – et de rejoindre plus tard la Résistance à Londres, sans plus de succès… Autant de pérégrinations qui inscrivent La Promesse de l’aube dans la tradition romanesque française et font voyager le spectateur aux quatre coins du globe, entre la Pologne, le Mexique, Nice, Paris, l’Afrique et l’Angleterre. Un récit mondialisé, certes, mais comme seule l’Histoire du XXe siècle pouvait en produire de sensés. À mille lieues, évidemment, de l’imaginaire libertaire bourgeois et de l’universalisme trotsko-droit-de-l’hommiste qui ont aujourd’hui le vent en poupe.

Beau et à la fois cruel, le dénouement du récit s’achèvera sur l’accomplissement littéraire de Romain Gary, à l’insu de celle qui n’aura eu de cesse de le tirer toujours plus haut et qui, pour ainsi dire, l’aura enfanté dans tous les sens du terme.

La déclaration d’amour est vaine et c’est précisément en cela qu’elle est émouvante.

4 étoiles sur 5

https://www.youtube.com/watch?v=BmvtfalAf0c

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31 décembre 2017 à 12:49

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