Près de mille agressions de médecins en 2016, surtout dans les zones à risques !

5609533_11-1-2030152236_1000x625

Mardi 2 mai, en fin de matinée, le docteur Pierre Goidin, exerçant à Dunkerque, quitte son cabinet après une matinée de consultations. À la sortie de son lieu de travail, il est pris à partie par des "jeunes désœuvrés" qui squattent régulièrement cet endroit. Ce groupe se retrouve pour fumer et faire hurler leurs radios devant l'immeuble ou face à celui-ci dans un petit square. Leur passe-temps favoris : haranguer les passants.

"Ils sont là en permanence, à faire du tapage, mettant la musique à fond", se plaint le médecin à La Voix du Nord.

Mais ce jour-là, la tension monte d’un cran, le généraliste est frappé, il reçoit un violent coup de pied qui lui occasionne une fracture du plateau tibial, juste en dessous du genou. Après cette attaque, les trois agresseurs s’enfuient en courant. Le médecin se fait soigner puis dépose plainte.

Les trois mêmes individus, dans l’après-midi, reviennent dans le quartier mais, cette fois, ils changent de victime et s’en prennent à un kinésithérapeute. Ils font irruption dans son bureau et le projettent violemment en arrière avant, de nouveau, de prendre la fuite. Le kiné signale immédiatement par courrier les faits au procureur de Dunkerque. Résultat néant. Lorsque Pierre Goidin reprend son travail, avec des béquilles, ses agresseurs sont toujours là, c'est ce qu'il explique dans le journal nordiste : "Ils étaient là mercredi, jeudi et vendredi, toujours menaçants, insultants […] J’étais en consultation quand ils mettaient des coups de pied dans la porte du cabinet, en vociférant. Mon patient était terrorisé. C’est une situation insupportable."

Vendredi, dans la soirée, le toubib est de nouveau agressé physiquement mais, cette fois, la police intervient. Elle interpelle les trois adolescents, âgés de 13, 14 et 15 ans, et les place en garde à vue pour violences en réunion. C'est maintenant à la justice des mineurs de statuer, mais Pierre Goidin croit savoir qu’ils ont été remis en liberté à l’issue des gardes à vue. Depuis, il vit dans la crainte des représailles.

"Je reviens au travail la boule au ventre. C’est une angoisse permanente. J’ai déposé plainte à deux reprises. Je n’ai aucune nouvelle des suites de la procédure. Mes patients ont peur, ma remplaçante ne veut plus venir."

Il confiait au quotidien ne plus savoir quoi faire :

"Le plus délicat, c’est le soir, quand je termine mes consultations, entre 21 h et 21 h 30. Je m’attends forcément à ce qu’ils reviennent Et là, qu’est-ce qui va se passer ?"

Voilà une histoire banale comme il en survient de nombreuses fois à proximité de quartiers chauds de notre belle France. Vous pensez, il suffirait de trois claques et l'affaire serait réglée. Hélas, vous avez tout faux car, avec une telle action, ce serait le médecin qui se trouverait en garde à vue. Et puis, imaginez l'attitude des grands frères devant cette offense. Là, pour le coup, on l'empêcherait d'exercer en saccageant son cabinet, voire en le blessant grièvement.

Dans un reportage du journal de TF1 sur ce sujet, l'Observatoire pour la sécurité des médecins a annoncé 968 agressions en 2016. Alors, que faire ?

La Confédération des syndicats médicaux a la réponse à ces phénomènes récurrents : aide à la vidéosurveillance, création d'un numéro poste agression et statut de professionnel protégé. Comme on le voit, le but n'est pas de s'attaquer frontalement aux délinquants en exigeant une police plus prompte et une justice plus sévère, mais de mettre la tête dans le sable et de ne pas regarder en face la criminalité.

Moralité : sans sanction efficace, nous aurons de moins en moins de médecins dans les banlieues à risques !

J.-P. Fabre Bernadac
J.-P. Fabre Bernadac
Ancien officier de Gendarmerie - Diplômé de criminologie et de criminalistique

Pour ne rien rater

Les plus lus du jour

L'intervention média

Les plus lus de la semaine

Les plus lus du mois