Il y a longtemps qu'à côté de sa vraie mission, la médecine est appelée en renfort (quand ce n'est pas en première ligne) pour guérir les maux de la société. Votre chef vous embête ? Un bon arrêt de travail le ramènera à la raison. Vous ne voulez pas que votre ex emmène vos enfants faire du rafting ? Un certificat médical trouvera bien un motif de contre-indication. Soudure difficile entre le plan social et l'âge de la retraite ? Pourquoi pas l'invalidité ? On ne sait pas quoi faire de grand-mère quand on part pour le camping des Flots-Bleus ? Allez hop, Mamy, aux urgences !

Alors aujourd'hui, c'est au terrorisme mahométan que la médecine, et plus précisément la psychiatrie, serait censée remédier. (C'est ballot qu'on n'ait pas pensé à envoyer nos psys en Allemagne dans les années trente, pour y expliquer que l'antisémitisme, ce n'est pas bien. Ça nous aurait sûrement évité un tas de soucis !)

C'est ainsi que notre ministre de l'Intérieur a déclaré, après la tuerie de Barcelone, vouloir mobiliser les hôpitaux psychiatriques et les psychiatres libéraux, afin de permettre aux services de renseignement de pouvoir intervenir plus tôt en détectant des assaillants potentiels. Il s'agirait d'organiser des "échanges" avec les praticiens qui côtoient les gens ayant "des délires autour de la radicalisation islamique".

Mais pour ça, il faudra changer de toute urgence le Code pénal et celui de la santé, parce que leurs textes ne badinent pas avec le secret professionnel… D'ailleurs, à quoi bon des psychiatres professionnels, puisqu'en quatre heures, le procureur de Marseille a pu déterminer que le prénommé Idriss, qui venait d'y écraser une femme ce lundi matin, n'avait rien d'un djihadiste et tout d'un malade mental ?

Personne n'est dupe, mais pour en revenir au ministre de l'Intérieur, et à supposer que ses déclarations soient suivies d'effets, on peut prévoir sans risque que sa suggestion sera aussi inopérante que l’unique centre de déradicalisation, ouvert à titre expérimental en septembre 2016 en Indre-et-Loire. Prévu pour prendre en charge 25 personnes sur la base du volontariat, il n’en a accueilli que neuf et était vide depuis février dernier. Il va être fermé.

Car l'essentiel est que le lien entre maladie mentale et terrorisme est bien loin d'être avéré. Les pilotes qui se sont jetés sur les tours du World Trade Center n'avaient, comme la plupart des terroristes, aucune maladie mentale. Quant aux gens qui souffrent de véritables troubles psychiques, ils ne commettent statistiquement pas plus d’homicides que la population générale. Non, le point commun entre ces assassins est ailleurs, même s'il est dangereux à prononcer…

296 vues

21 août 2017 à 21:26

Partager

La possibilité d'ajouter de nouveaux commentaires a été désactivée.