À l’instar de tous les politiciens professionnels, Valérie Pécresse n’a aucune conviction. Ou plutôt si : une seule. Celle qu’aucune parole n’engage jamais dans la durée. En appelant à voter Macron au second tour, puis en demandant l’exclusion de Christine Boutin de LR, non seulement la présidente de la région Île-de-France s’est fourvoyée, mais encore elle s’est ridiculisée.

Avec son allure de bonne bourgeoise Cyrillus-mais-pas-trop, Valérie Pécresse est le type même de femme politique qui attire spontanément les suffrages de sa catégorie sociale. Ancien ministre des Universités de François Fillon, elle n’a laissé qu’une trace fugace dans l’action gouvernementale. Tout autre a été l’habileté avec laquelle elle a conquis une région ancrée à gauche, grâce à ses appuis partisans, à l’usure d’un pouvoir socialiste déconsidéré, aux outrances de son adversaire et, accessoirement, à l’engagement des gogos qui ont cru qu’elle partageait leur combat.

En 2013, madame Pécresse votait contre la loi Taubira, quand d’autre s’abstenaient prudemment. Quelques mois plus tard, elle participait à une manifestation à Versailles et déclarait alors "La famille en France, c'est une valeur plus que partout ailleurs", aux côtés de Jean-Frédéric Poisson et du maire du Chesnay. Puis, après avoir reçu le soutien enthousiaste de Sens commun, elle a peu à peu infléchi sa position. La manière dont elle a fait cocus ses soutiens conservateurs n’est pas à son honneur. On croyait cela réservé à quelques vieux briscards nostalgiques du Président Chirac. Élue à la tête de la région, elle s’est empressée de ne pas couper les subventions aux associations LGBT, se contentant d’un toilettage sans toucher à l’essentiel. Un coup à droite, un coup au centre. L’important est ailleurs, c’est bien connu…

Lors de la primaire de novembre, madame Pécresse s’est signalée par son talent de contorsionniste : ralliant Alain Juppé quelques jours avant le premier tour, elle s’est rapidement trouvée un des plus fermes soutiens de François Fillon. Et, comme il fallait s’y attendre, elle n’a pas hésité longtemps avant d’appeler à voter Macron. Rien d’étonnant à cela, en bon apparatchik du parti, elle sait parfaitement qu’une feuille de papier à cigarette sépare En Marche ! de la ligne centriste de LR. Nulle incompatibilité entre eux, comme le montrent les nombreux ralliements de ces derniers jours.

Ainsi, Christine Boutin a appelé à voter Le Pen ! Crime impardonnable aux yeux de ces farouches européistes qui ne peuvent pas tolérer une telle impudence. Ces gens-là sont sincères : persuadés, pour nombre d’entre eux, que Marine Le Pen est un monstre mi-fasciste, mi-gauchiste, ils sont terrifiés à l’idée qu’elle puisse accéder au pouvoir. Pensez-donc : ils ne seraient plus entre eux ! Plus encore, la manière dont Christine Boutin, avec son habituelle subtilité sémantique, a appelé à un "vote révolutionnaire" horrifie plus que tout ces prébendiers qui ne pensent qu’à conforter, aussi longtemps que possible, leurs vies confortables d’élus.

Partout, en France, des élus LR bien comme il faut, qui marient leur fille en blanc et sont au premier rang à l’église, s’apprêtent à donner leur voix au pire déconstructeur que le système ait engendré. En 1940, Vichy grouillait de ces gens-là.

Mais madame Pécresse ne le sait pas. Pas plus qu’elle ne sait que Christine Boutin n’est pas membre de LR. Pour l’en exclure, cela risque d’être compliqué…

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29 avril 2017 à 13:56

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