Tout le monde sait que les garçons naissent dans les choux et les filles dans les roses. Désormais, il existe une autre dichotomie entre les sexes : les villes ne seraient pas faites pour les femmes mais pour les hommes.

Cette lumineuse pensée s’est échappée du cerveau foisonnant de Pascale Lapalud, urbaniste et présidente du think tank Genre et Ville – tout est dit ! –, qui se veut une "plateforme de recherche et d’action, […] composée d’urbanistes, de sociologues, d’architectes, d’artistes, dont l’objet est de rendre les territoires égalitaires et inclusifs" (genre-et-ville.org).

Affirmant doctement que "la ville est faite par et pour les hommes", ce chantre du progressisme architectural "s’est donné pour mission de réfléchir à la place accordée aux femmes dans l’espace urbain. Paris a, par exemple, souhaité confier au collectif Les MonumentalEs, dont Genre et Ville fait partie, le réaménagement des places de la Madeleine et du Panthéon" (Le Monde).

On voit donc que, même en matière d’urbanisme, on est en marche vers le dévastateur ridicule. Et c’est Paris qui va en faire les frais. D’ici à ce que l’on reproche le caractère trop phallique de la tour Montparnasse, il n’y a pas loin.

Or, et c’est une chose communément admise, Paris est une ville féminine par excellence, qui évoque au monde entier l’amour, l’art, le romantisme, la mode (évidemment), toutes choses qui font nettement plus songer au beau sexe qu’aux dockers de Hambourg. Charles Trenet, peu connu pour sa virilité brutale, comparait Paris à "une fleur", "c’est Lison, Manon, Lisette" ("Le Cœur de Paris"). N’importe quel quidam se promenant dans ses jupons de pierre réalisera rapidement à quel point Paris est un écrin pour la femme. "J’ai plus écrit de toi Paris que de moi-même / Et plus que de vieillir souffert d’être sans toi" (« Paris 42 »), soupirait Louis Aragon.

Au fait, de quelles femmes parle Pascale Lapalud ? La réponse se trouve dans un article de Libération, où elle expose clairement sa démarche : "La place des femmes comme celle des hommes dans la ville mérite d’autres dispositions que cette expression “naturaliste” des différences femmes-hommes. En affirmant haut et fort “Même pas peur !” nous montrons que le changement est à notre portée. Nous prenons le contre-pied des injonctions qui tentent d’uniformiser les identités, de les solidifier en deux blocs distincts." La théorie du genre n’existe peut-être pas, mais qu’est-ce qu’elle est bruyante, ces derniers temps !

Une fois de plus, l’idéologie dominante "s’étend, et s'enfle, et se travaille" (La Fontaine) pour nous infliger le pire, c’est-à-dire, dans le cas qui nous occupe, défigurer une ville qui se portait jusqu’alors très bien sans elle. François Mauriac écrivait que "Paris est une solitude peuplée". Je ne dirai pas de quoi, je pourrais devenir grossier. Ce qui est certain, c’est que là, on ne touche même plus le fond, on attaque carrément la croûte terrestre !

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11 mars 2018 à 15:24

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