Nicolas Sarkozy aurait pu le dire.

Emmanuel Macron l'a dit.

Lors d'une visite en Corrèze, émaillée par des manifestations des salariés de GM&S, le président de la République, s'adressant en aparté au président Rousset, a déclaré : "Il y en a certains, au lieu de foutre le bordel, ils feraient mieux d'aller regarder s'ils ne peuvent pas avoir des postes..."

Il paraît que ce propos a été détaché de son contexte mais peu m'importe. Je voudrais le défendre ou au moins tenter de l'expliquer tel qu'il est.

L'opposition, évidemment, est vent debout et dénonce, comme il était prévisible dans un monde politique pauvre qui ressasse et use toujours des mêmes arguments et des mêmes critiques, l'arrogance et le mépris d'Emmanuel Macron. Il va de soi que ces procureurs de l'instant sont toujours eux-mêmes très délicats dans leur expression mais ils s'excusent vite puisqu'ils ne sont pas président de la République !

Il est vrai aussi que chacun, aujourd'hui, se sent autorisé à donner des leçons à Emmanuel Macron puisque nous avons même un DSK qui resurgit et qui, à son intention, énonce qu'il y a des différences entre les "valeurs de droite" et les "valeurs de gauche". Il est clair que le président de la République n'aurait pas pu deviner tout seul cette fulgurance !

Je perçois cependant ce qui, dans cette saillie énervée d'Emmanuel Macron à Égletons, a pu susciter immédiatement l'incompréhension, la révolte, voire l'indignation. Pas si facile de trouver des postes, au demeurant dans des lieux très éloignés de ses bases naturelles ! Trop commode, pour le responsable de l'État, de si vite trancher en affirmant "qu'il n'y a qu'à" !

Emmanuel Macron a déjà, en d'autres circonstances, montré que si son intelligence était complexe et son verbe généralement châtié, il ne répugnait pas à une sorte de parler vrai, voire de brutalité qui révélait ce que sa personnalité a de direct, d'autoritaire et de sans appel. Il me semble qu'il a besoin parfois de compenser sa politesse politique et les efforts constants qu'il doit s'imposer pour supporter la bêtise et la démagogie d'autrui par des foucades improvisées et sans fard qui ne sont réprouvées que par l'hypocrisie partisane mais absolument pas par une majorité de citoyens.

Dans cet échange avec le président Rousset, Emmanuel Macron fait preuve d'un bon sens qui probablement, en dépit du socialement et du politiquement correct, a fait plaisir à beaucoup. Les salariés, en France, sont intouchables : qu'ils soient au chômage, en recherche d'emploi ou en activité. Proférer à leur encontre un zeste de réserve, une once de désapprobation suffit à vous disqualifier !

Le président de la République n'en a eu cure et il a ajouté à cette provocation l'admonestation, le poncif, certes dans un style relâché, qu'il y avait mieux à faire "qu'à foutre le bordel". Qui, de bonne foi, pourrait ne pas approuver cette vulgarité dans la forme mais cette justesse dans le fond ? Qui irait, sauf La France insoumise et la CGT, se féliciter du désordre en le prétendant créateur et créatif ?

Va-t-on reprocher à Emmanuel Macron de dégrader la fonction présidentielle parce que, par incidence et sincèrement, il a soumis à l'attention publique, par l'entremise d'une écoute indiscrète, un propos clair, net qui dans sa substance n'a rien qui puisse nous rendre honteux de celui qui nous représente ?

Il faut arrêter de tout confondre. La dénaturation en profondeur de l'allure présidentielle, de la tenue officielle - il n'est personne qui puisse, sur ce plan, lui imputer quoi que ce soit - avec des spontanéités libres, peut-être provocatrices mais nullement choquantes.

Sauf à considérer qu'un président de la République n'a pas, n'a plus droit au bon sens.

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07 octobre 2017 à 11:08

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