Philippe Bilger apporte son éclairage sur les ennuis judiciaires de François Bayrou et continue à faire l'éloge des "débuts éblouissants" du nouveau Président.

L'affaire semble un petit peu anecdotique, mais le calendrier est assez malheureux pour le nouveau garde des Sceaux dont le procès vient d'être renvoyé en procès pour diffamation.
Cette affaire est-elle grave pour un Garde des Sceaux?

Je ne crois pas.
D'abord, cela relève d'une infraction de presse, à supposer qu'elle soit condamnée en tant que telle le jour de l'audience. C'est surtout la particularité de la procédure de presse qui ne rend pas l'affaire grave.

Lorsqu'une information est ouverte en matière de presse, en réalité le juge d'instruction n'a pratiquement rien à faire. Il est tenu de renvoyer le mis en examen devant le tribunal correctionnel une fois qu'il a vérifié l'élément de publicité et l'imputabilité de la responsabilité.

Là, il n'y a pas de doutes, c'est bien François Bayrou qui a tenu le propos et puis la publicité est évidente.
Donc le juge d'instruction renvoie automatiquement le mis en examen devant le tribunal correctionnel. En aucun cas, c'est une appréciation anticipée sur sa culpabilité. C'est uniquement lors du débat correctionnel que François Bayrou, avec son avocat, pourra faire valoir son argumentation. Et j'espère que la liberté d'expression triomphera.

Plus largement, Emmanuel Macron est maintenant président de la République depuis quelques semaines.
Quelle est votre impression sur ce début de quinquennat?

Je trouve que le président de la République a énormément réfléchi sur les quinquennats précédents. Au fond et sans aucune flagornerie, je trouve que ses débuts sont éblouissants à la fois sur le plan de l'esthétique et d'une manière singulière sur le plan politique. Je pourrai changer d'avis demain sur d'autres sujets.

Sur le plan esthétique, c'est évident, de mon point de vue, on est passé d'un quinquennat vulgaire avec Nicolas Sarkozy et un quinquennat profus et bavard avec François Hollande, à un quinquennat élégant. Il suffit de se rappeler l'attitude d'Emmanuel Macron le 14 mai, comment il a su tirer les leçons du premier tour, l'élégance de la passation de pouvoir, et tout ce qu'il déroule depuis, notamment avec une parole enfin rare et présidentielle.

Sur le plan politique, il met en œuvre ce qu'il a annoncé. C'est pour cela qu'il me semble qu'on ne se trouve pas dans la politique politicienne. Celle-ci résulterait de coups ou de subterfuges ou de pièges qui s'inscriraient dans une vision classique et orthodoxe de la politique. Mais il a dit durant sa campagne qu'il voulait dépasser la droite et la gauche, mêler droites et gauches. Alors je ne sais pas s'il ira jusqu'au bout de cette volonté, mais ce qui règne aujourd'hui, c'est l'incarnation de cette démarche qu'il a voulu et qu'il a rappelé sans arrêt.

Cela est fondamental et crée probablement un autre air dans notre République, et ouvre peut-être une nouvelle ère dans notre démocratie. Alors derrière tout cela, il n'y a pas qu'une volonté humaniste, c'est très clair. Je ne sous-estime pas la rouerie très habile, très rusée et infiniment soyeuse derrière des apparences de consensus et de concorde.

Il n'empêche qu'aujourd'hui, il me semble et d'ailleurs c'est validé par les citoyens, on n'est plus du tout dans le même type de quinquennat que dans les quinquennats précédents.

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22 mai 2017 à 17:32

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