Selon un sondage ELABE publié le 9 septembre, 39 % des Français estiment qu’aucun mouvement politique en particulier n’incarne l’opposition à Emmanuel Macron. Si, pour un tiers des sondés, La France insoumise apparaît comme le premier opposant à l’exécutif, le Front national (14 %) et Les Républicains (9 %) sont loin derrière, le Parti socialiste, le Parti communiste et l’UDI se partageant les miettes.

Rien d’étonnant, même s’il ne faut pas oublier que la rentrée n’a pas encore eu lieu et que les sondages expriment l’état de l’opinion à un moment donné. Mais cette enquête omet de citer le premier responsable de l’opposition des Français à la politique actuellement conduite : c’est Macron lui-même.

Le patron de La France insoumise a fait beaucoup de cinéma, confirmant le règne de ce que Kundera – cité dimanche sur BFM TV par Gilbert Collard – appelle l’imagologie. Le Parti socialiste, après sa déconfiture, Les Républicains, dont beaucoup sont assis entre deux chaises, ont du mal à passer pour des opposants crédibles. L’image de Marine Le Pen s’est quelque peu ternie, après un second tour décevant à l’élection présidentielle et avant la refondation annoncée.

Le Front national paraît divisé, même si ses dissensions semblent montées en épingle par les médias pour le discréditer. Les partisans de Florian Philippot veulent engranger des voix sur leur gauche. Les proches de la ligne de Marion Maréchal-Le Pen estiment possible de s’entendre avec une partie de la droite. Peut-être le futur congrès trouvera-t-il un compromis : défendre des valeurs d’autorité et de souveraineté n’empêche pas, bien au contraire, de défendre des valeurs sociales.

Emmanuel Macron ne prend pas ses opposants au sérieux, mais ignore les effets délétères de son comportement arrogant et méprisant. Il multiplie les maladresses verbales, tant il est imbu de lui-même. Après avoir déclaré, en Roumanie, que "les Français détestent les réformes", il n’a rien trouvé de mieux que de récidiver à Athènes, en tenant un propos pour le moins ambigu : "Je ne céderai rien, ni aux fainéants, ni aux cyniques, ni aux extrêmes."

Son lieutenant Castaner, socialiste repenti, a tenté de justifier cette formule au « Grand Rendez-vous » de CNews/Europe 1/Les Échos, mais ne convainc pas. Il soutient que "le président de la République a parlé de ceux qui n'ont pas eu le courage de faire les réformes nécessaires", ce que ne peut signifier syntaxiquement son propos. Son embarras et ses explications confuses mettent encore plus l’accent sur les défauts de son nouveau mentor.

Aucun Président n’a, avant Macron, fait preuve d’une telle morgue. Sans doute prête-t-on à de Gaulle la fameuse expression "Les Français sont des veaux". Mais, à supposer qu’elle soit authentique, il ne l’a pas employée publiquement, en sachant qu’elle serait répétée : il manifestait plus son ambition pour la France, dont il défendait la souveraineté, que son mépris pour des Français versatiles. Par rapport à de Gaulle, quoi qu’on pense de sa politique quand il est revenu au pouvoir, Macron fait figure de nain.

S’il a des ambitions, c’est pour lui-même plus que pour la France. Il a fait la tournée des popotes européennes pour faire croire aux chefs d’État étrangers qu’il est quelqu’un. S’il défend des intérêts, ce ne sont pas ceux d’un peuple qu’il méprise mais ceux d’une oligarchie financière. Malgré ses talents de comédien, son regard dit tout le bien qu’il pense de lui-même.

La Bruyère écrivait, dans Les Caractères, que "le dédain et le rengorgement dans la société attirent précisément le contraire de ce que l'on cherche, si c'est à se faire estimer". Emmanuel Macron devrait relire ses classiques, lui qui se targue d’être un littéraire.

Cet article a été mis à jour pour la dernière fois le 07/11/2023 à 10:21.

2536 vues

12 septembre 2017 à 2:53

La possibilité d'ajouter de nouveaux commentaires a été désactivée.