Les résultats du premier tour de l’élection présidentielle sont cinglants. La fracture nationale et la fracture sociale se renforcent. C’est même la confirmation d’un véritable vote de classe entre métropoles et périphéries, exclus et inclus, riches et pauvres, éduqués et peu diplômés. Une dynamique de classe qui va s’amplifier lors du deuxième tour dimanche prochain.

Si la France d’en haut a voté majoritairement en faveur d’Emmanuel Macron et de François Fillon, la France d’en bas a reporté massivement ses suffrages sur Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon. Le géographe Christophe Guilluy avait souligné, avec une acuité visionnaire avant ces élections : "Si le système en place parvient à faire élire un Macron, il préservera l’essentiel, mais en sortira fragilisé : certains sondages donnent Marine Le Pen à 40 %, voire 45 % au second tour, ce qui est considérable par rapport aux 18 % de Jean-Marie Le Pen en 2002. La dynamique est de ce côté-là." Et d’ajouter: "Si rien n’est fait, Marine Le Pen ou un autre candidat contestant le modèle dominant, sous une autre étiquette, gagnera en 2022, si ce n’est en 2017. On est à un moment de basculement. Si la France d’en haut ne fixe pas comme priorité le sauvetage des classes populaires, elle est condamnée" (Le Crépuscule de la France d’en haut, Flammarion, 2016).

Le nouveau clivage entre gagnants et perdants de la mondialisation se substitue au clivage droite-gauche. Les classes populaires se précarisent. Les classes moyennes disparaissent. Les classes aisées sont non seulement privilégiées, mais entrent aussi en sécession avec le peuple. Christophe Guilluy (toujours lui) pouvait réitérer au lendemain du 1er tour : "[…] Le grand projet de la mondialisation, c’était bien la fin de la classe moyenne, et en conséquence celle des partis traditionnels de droite et de gauche qui avaient construit leur discours politique à l’attention de cette catégorie."

Et Guilluy de noter pertinemment : "La France d’en bas est en passe de s’autonomiser vis-à-vis de la France d’en haut : politiques, journalistes, universitaires sont devenus inaudibles" (Marianne, "La France d’en bas prend son autonomie", propos recueillis par Emmanuel Lévy, n° du 28 avril au 9 mai 2017).

Le phénomène populiste témoigne d’une lutte des classes invisibles pour l’instant. Macron est le représentant emblématique de la caste libérale et de la casse sociale en cours. Il est « […] le candidat des métropoles mondialisées, note Guilluy. Inversement, de la même manière que l’Amérique périphérique a portée le vote Trump et l’Angleterre périphérique le Brexit, la France périphérique, celle des petites villes, des villes moyennes et des zones rurales, porte pour partie la contestation populiste. Partout ce vote repose sur une sociologie, celle des ouvriers, des employés, d’une partie des professions intermédiaires » (Le Monde, "Macron, le candidat de la France d’en haut", 27 avril 2017, propos recueillis par Marc-Olivier Bherer). Guilluy observe alors avec raison : "La France d’en haut a […] plus à redouter de son mépris de classe, de son grégarisme social, et plus généralement de son enfermement intellectuel, que des élections."

À la mondialisation sauvage s’ajoute une immigration pléthorique. Le libéralisme-libertaire et post-national de Macron conduit à la circulation des biens, des capitaux, des services et des hommes. C’est la société cool, ouverte et transnationale que défend la Nouvelle classe. Face à celle-ci, Marine Le Pen propose un retour aux frontières nationales pour protéger les Français les plus fragilisés. Une frontière n’étant pas un mur mais un filtre ! Ce patriotisme intégral s’avère indispensable à la survie du peuple français.

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02 mai 2017 à 12:20

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