Comme un parent agitant le spectre du père Fouettard ou de la fée Carabosse pour calmer les ardeurs de son moutard qui tarde à s'endormir, Macron agite la chimère du chaos pour imposer l'idée de l'Union européenne. C'est son credo, l'alpha et l'oméga de sa conviction politique qu'il annonce sempiternellement. Cette fois, il a choisi le Bundestag pour alimenter cette chronique qui occupe les esprits depuis soixante-dix ans sans donner la preuve du début d'autre chose qu'une folle espérance chimérique. Cette propension à délocaliser l'expression de ses offres politiques à visée électoraliste s'était déjà manifestée alors que, simple candidat, il avait osé se rendre à Alger pour dénoncer le crime contre l'humanité que la France aurait commis là-bas. Peut-être s'agit-il, dans ce cas, d'une fuite face aux événements, qui sait.

Selon lui, les peuples d'Europe n'ont pas d'autre choix que se plier aux exigences, pourtant exorbitantes, de la Commission bruxelloise, faute de quoi c'est tout le continent qui basculerait dans un phénomène cataclysmique fatal.

Cela mérite qu'on s'y arrête un instant.

Les tenants du mythe "unioniste" avancent l'argument selon lequel la paix universelle ne peut être qu'à ce prix. Et, ajoute-t-il, la persistance, ici même, de celle-ci depuis 1945 en serait la preuve.

C'est oublier un peu vite qu'en réalité, celle-ci n'a tenu que grâce à trois éléments circonstanciels déterminants. Le premier est l'existence de la guerre froide qui a gelé toute possibilité de conflit armé direct sur le continent jusque dans les années 90. Le deuxième réside dans la possession de l'arme de la dissuasion dont dispose la France depuis le début des années 60. Le troisième est que l'Allemagne, principal acteur de tous les conflits de cet endroit du monde depuis 1815, est désarmée militairement et pacifiée idéologiquement. Par ailleurs, on peut être légitimé à considérer que cette communauté spectrale dénuée de tout sentiment identitaire et constituée de composantes aux passés historiques si différents, voire opposés, n'a jamais su imposer la paix réelle et absolue, laquelle fut entachée de conflits localisés mais dévastateurs comme, par exemple, dans les Balkans. Sur le plan international, de quel succès politique, diplomatique - pour ne pas évoquer le domaine belliciste et guerrier - ce monstre cacochyme peut-il se vanter ?

Pour le reste, c'est-à-dire le développement économique et la prospérité des peuples qui composent la galaxie hétéroclite, la chose essentielle qui saute aux yeux, c'est que les distorsions et les inégalités s'accentuent et creusent un fossé abyssal. L'opulence pour les uns, les difficultés pour les autres, avec une volonté opiniâtre des instances communautaires de faire respecter des règles ultralibérales qui gèlent toute possibilité de rééquilibrage, si tant soit peu cette idée existait dans l'esprit des fonctionnaires de l'Union.

L'unité que les unionistes veulent mettre en œuvre se pare d'un humanisme béat d'apparence mais, en réalité, elle n'a de visée que le renforcement des oligarchies possédantes dont le patrimoine ne cesse de grossir quand les citoyens peinent, dans leur grande majorité, à s'assurer un bien-être relatif. Où sont les harmonisations fiscales dont auraient besoin nos pays unis ? Les disparités légales demeurent en matière de droit du travail, dans le domaine pénal et dans toutes les dimension de l'activité humaine.

Pour ce qui concerne la France, elle apporte au budget commun la somme non négligeable de vingt-trois milliards d'euros. Elle reçoit, en retour, quinze milliards de subsides. La contribution nette est donc de huit milliards. Que reçoit-elle en contrepartie de la cohorte beuglante et attentiste des velléitaires européens, elle qui se dessine comme son bras armé chèrement assumé par son propre budget de l'Europe ? Un déséquilibre commercial qui grossit chaque jour avec nos principaux "partenaires", la désertification industrielle, l'accroissement de la dette.

Non, Monsieur Macron, vous vous trompez encore et vous bernez les Français qui, espérant dans une véritable Europe unie, ne veulent plus de ce conglomérat dont la vocation n'a guère de considération pour eux !

Et plutôt que de leur promettre d'illusoires baisses d'impôts, commencez par réduire les charges, c'est la seule façon raisonnable de réussir le désendettement et de réamorcer la "remontada".

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21 novembre 2018 à 22:20

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