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Il est toujours éclairant de mettre en correspondance l’immédiateté de la chronique journalistique et le temps, plus long par construction, du livre.

Dans son jargon, Gilles Deleuze écrivit jadis à ce sujet que "le pli du journal, poussière ou brume, inanité" devait trouver son "nouveau mode de correspondance avec le livre, pli de l’Événement". C’est, en somme, ce que propose ici Ivan Rioufol, dont on connaît les interventions terriblement lucides dans Le Figaro et les livres, non moins terribles et non moins lucides, comme La guerre civile qui vient (Pierre-Guillaume de Roux, 2016).

L’« événement deleuzien » lui est ici fourni par l’élection météorique d’Emmanuel Macron à la présidence de la République.

À la faveur de cette élection, Ivan Rioufol a compilé un certain nombre de ses chroniques de la macronisation des esprits en marche, entre janvier 2016 et mi-octobre 2017. Avec une pertinence que le retour en arrière rend prophétique, il y décortique impitoyablement l’imposture de l’ingénierie sociale déguisée en compréhension du peuple, le mensonge du tout-économique et, surtout, l’assourdissant silence du « nouveau monde », vis-à-vis de la conquête matérielle et morale de la France par l’islamisme et ses corollaires (violence, régression, condition des femmes…).

En tournant les pages de cette somme de petites actualités, on revient avec l’auteur sur la succession d’attaques contre la France (et non contre les sottes « valeurs de la République ») : agressions, insultes, zones de non-droit d'une part ; soumission, déni, novlangue et « thé de la fraternité » à la mosquée de Paris de l’autre.

Et quand survient le héros du livre, à la faveur d’une chronique de mai 2016, c’est progressivement, insidieusement.

Ivan Rioufol, de son poste d’observation, se fait bookmaker des élections, à une époque antédiluvienne où on ne savait pas si Hollande se représenterait, où l’issue du combat entre Donald Trump et Hillary Clinton était encore incertaine. Il y enregistre le dégonflement de la baudruche Nuit debout, l’ascension d’Alain Juppé puis de François Fillon. Macron semble d’abord être un figurant. Quelle habileté de sa part, quand on y repense : en effet, mieux vaut arriver par surprise, tant le viol des foules ne s’embarrasse pas de préliminaires.

Dans cette rétrospective façon « Que sont-ils devenus ? », on croise Mélenchon qui fait une minute de silence pour les migrants noyés, Bayrou qui répète servilement la parole macronienne selon laquelle il n’y a pas de culture française…

Le candidat Macron, encensé par les médias, souvent évoqué au détour d’une phrase pour ses discours creux ou son omniprésence médiatique, n’apparaît en pleine lumière qu’à la fin du livre, entre les deux tours de l’élection. La suite, nous la connaissons tous, nous nous en souvenons mieux et nous la relisons avec consternation…

C’est peut-être le seul bémol de cette compilation, par ailleurs brillante et vibrante d’une juste colère : son titre. Car le véritable ennemi d’Ivan Rioufol, et notre ennemi à tous d’ailleurs, c’est l’islamisme de combat, appuyé sur l’artillerie lourde de la lobotomie médiatique, et ses vieilles munitions gauchistes usées par cinquante ans d’erreur. Macron n’est que l’image en trois dimensions (et encore) de cette méprisable dhimmitude à paillettes, et son nom n’apparaît que tardivement ; pourquoi, dès lors, un tel titre ? Pour vendre ? On n’ose le croire.

Je retiens cependant, en guise d’envoi, cette interrogation, que les mois qui suivirent ont rendue purement rhétorique : p. 451, « l’usage du slogan et du déni sera-t-il la marque de la macrocrature ? » Oui, plutôt oui. À l’inverse, Ivan Rioufol est "maître ès punchlines" lucides, et à ce titre, son livre ne vous décevra pas.

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28 février 2018 à 10:39

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