Si l’entretien d’Emmanuel Macron sur France 2, dimanche soir, reflète l’avenir de l’audiovisuel public, on a de quoi s’inquiéter. À entendre le ton doucereux de Laurent Delahousse, on en venait presque à regretter David Pujadas – ce qui n’est pas peu dire ! Si les journalistes des chaînes publiques veulent retrouver un peu de crédit, qu’ils s’abstiennent de participer aux séances d’autoglorification organisées par l’Élysée.

On n’a rien appris de nouveau dans cette émission, sinon que Macron, tout comme Tartuffe, n’est pas un homme qui se mouche du pied. Voyez comme il est imbu de lui-même, parlant de lui à la troisième personne, maniant la langue de bois avec l’aplomb d’un bonimenteur, faisant des mots d’esprit en les soulignant du regard, au cas où on n’aurait pas compris ! Il n’a jamais mieux mérité le nom de Jupiter, Jupiter Olympien qui se pense au-dessus des autres, mais Jupin travesti, comme dans la parodie de Scarron, tant il est une caricature de lui-même.

En matière de chômage, il est plus prudent que son prédécesseur (qu’il conseillait pourtant à l’époque) : « Les décisions que nous avons prises n’ont pas d’impact immédiat, il faut compter deux ans », précise-t-il. Il a pris ses responsabilités en faisant « la réforme la plus importante que la France a évitée depuis vingt ans ». Quelle chance nous avons ! Qu’aurions-nous fait sans lui ?
Interrogé sur la Syrie, il a affirmé, péremptoire, que la guerre contre l’organisation djihadiste serait « gagnée d’ici mi, fin février ». Quant au président Bachar Al-Assad, il faudra en même temps parler avec lui et le faire juger par son peuple et la justice internationale. Drôle de façon d’engager le dialogue…

Nicolas Hulot devra ronger son frein ou manger son chapeau. Déjà épinglé sur le nombre de véhicules polluants qu’il possède – il ne les utilise que de manière très occasionnelle, apprend-on dans le JDD –, le ministre de la Transition écologique se voit contraint, après le traité de libre-échange entre l’Union européenne et le Canada (CETA) et la question du glyphosate, d’avaler la couleuvre du nucléaire. Macron le traite comme un enfant et donne des leçons à ce ministre de vingt-deux ans son aîné : c’est un « inquiet », il apprend les « contraintes » du pouvoir. Pauvre Monsieur Hulot : sans doute va-t-il bientôt partir en vacances !

Mais celui qui en a pris le plus pour son grade, c’est sans conteste Laurent Wauquiez, le nouveau président des Républicains, qui l'avait accusé d’avoir « la haine de la province » : « Ça n'apporte rien au pays, ça dit la haine qu'il a pour votre serviteur », lui rétorque-t-il par caméra interposée. « Je la lui laisse, qu'il vive avec, ça fera son quotidien ». Jupiter ne se commet pas avec les vilains. Il ignore la critique pour ne pas y répondre.

À la fin de l’entretien, Emmanuel Macron avait l’air content de lui. Bonne prestation ! devait-il se dire. Il se targue d’être lucide sur la conjoncture économique et politique, mais il est aveugle devant ses propres défauts. Il se prend pour un surhomme alors qu’il n’est qu’un produit de marketing.

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18 décembre 2017 à 13:06

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