L’honneur du préfet de la République

Le Conseil des ministres a décidé de mettre fin, le 10 octobre 2017, à la fonction de préfet de région Auvergne-Rhône-Alpes concernant Henri-Michel Comet, en raison d’un grave dysfonctionnement des services de la préfecture à l’encontre d’un étranger en situation irrégulière, et qui s’est révélé par la suite être le monstrueux tueur des deux jeunes étudiantes victimes de la barbarie à la gare de Marseille.

Une telle décision est normale à l’égard du corps préfectoral, qui est une institution centrale de la République. Il ne s’agit pas de mettre en cause la personnalité ni la culpabilité de ce préfet, qui est au demeurant un des plus brillants et expérimentés de la carrière. C’est l’honneur du préfet d’assumer la responsabilité du service public, et même de la revendiquer comme la noblesse de sa haute mission. Le préfet doit répondre, en dehors de toute faute personnelle ou défaillance humaine, en cas de dysfonctionnement de ses services préjudiciable à l’intérêt public. Il se porte fort de l’efficacité de l’État, car la Constitution lui confie sur le territoire la charge des intérêts nationaux, du contrôle administratif et du respect des lois.

Le préfet n’est pas nommé pour bénéficier d’un titre ni pour occuper un poste. Il est appelé à servir pour représenter de façon irréprochable l’État et le gouvernement. C’est pourquoi les nominations ne doivent jamais relever de faveurs personnelles ou partisanes.

Contrairement à d’autres serviteurs de l’État, notamment dans les sphères supérieures, qui ne connaissent pas la démission en cas de faute ou d’erreur grave, le préfet n’a pas la possibilité d’échapper au sort de fusible qui lui est réservé par le gouvernement. Il ne peut qu’accepter le couperet de la sanction, sans explications ni murmures, en étant privé de toute garantie statutaire.

C’est pourquoi le représentant de l’État et du gouvernement sur le territoire, dont le devoir implique pour lui d’assumer en permanence la plénitude du risque et de la responsabilité, doit avoir le soutien, les moyens, la considération et le respect qui relèvent d’une relation de confiance avec le gouvernement.

Certes, la mission n’est pas toujours facile à remplir. Ainsi, en l’occurrence, le délinquant étranger, en situation irrégulière, avait été, auparavant et à plusieurs reprises, interpellé, gardé à vue et remis à l’administration pour être reconduit à la frontière. Or, l’exécution d’une telle décision, qui aurait déjà dû être engagée, s’est heurtée à Lyon à l’absence de places disponibles dans le centre de rétention et à l’obstruction inadmissible de l’État du pays d’origine.

Ne faut-il pas déplorer l’absence d’une mobilisation générale contre l’ennemi installé sur le territoire et l’insuffisance du renforcement maximum du dispositif de prévention et d’éloignement, exigeant les moyens en personnel indispensables, la rigueur impitoyable et la plus stricte réduction des délais ? C’est à ce prix que la totalité des services publics et l’ensemble de la population seraient encouragés à faire preuve du zèle maximum en toutes circonstances pour la lutte contre le fléau du terrorisme, qui relève de l’exemple et de l’impulsion prioritaire du gouvernement.

En définitive, cette mise en cause d’un haut fonctionnaire n’est pas une affaire locale ou personnelle. Elle révèle une carence d’ordre national qui appelle des responsabilités conséquentes.

Paul Bernard
Paul Bernard
Docteur en droit, préfet de région honoraire, ancien préfet de la région Corse, président d'honneur de l’Association du Corps préfectoral

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