Le retour au pays des dépouilles des soldats américains morts en Corée passe totalement inaperçu

drapeau USA

Lorsque le vice-président Pence a accueilli, à Hawaï, les restes des soldats tombés en Corée du Nord il y a deux générations, seul Fox en fit la relation, CNN y consacrant une minute et MSNBC… zéro. Il faut dire que les priorités sont ailleurs. L’on aurait pu, pourtant, remarquer le fait que la guerre de Corée n’en était pas une parce que le Congrès, seul habilité à déclarer la guerre, ne l’avait pas fait.

Absurde situation en laquelle les protagonistes se sont battus sans faire la guerre et ont cessé les hostilités (armistice) sans faire la paix. L’on aurait pu, ainsi, débattre de la fin de la science polémologique ou de celle du droit de la guerre, celle-ci se présentant désormais sous le masque d’opérations de police internationale, couvertes par des « coalitions » de circonstance. Et, d’ailleurs, la guerre contre qui ? Contre des États qui n’ont pas d’idéologies ou contre des idéologies ou religions qui n’ont plus besoin d’États, puisque ces derniers hébergent ces dernières comme des bernard-l’hermite ? Sans conditions…

Bref, la symbolique métamorphose de la remise, à l’armée, des petites boîtes d’ADN américaines recouvertes du drapeau des Nations unies, vites remplacées par des cercueils recouverts du drapeau américain ensuite présentés au vice-président pour faire passer les morts du statut de policier à celui de guerrier, aurait dû poser la question de « l’exceptionnalité » de ce pays qui se veut la république universelle d’un monde post-national. Que nenni ! Les élites américaines, toutes « estrancinées » (comme dirait Pagnol) de perdre précisément cette exceptionnalité, n’ont qu’une obsession : Trump, la Russie, Trump, la Russie, et encore Trump, la Russie.

Les agences de renseignement ont entamé le mois d’août au pas de charge, investissant collectivement la Maison-Blanche lors d’un point de presse la semaine dernière afin, tous en brochette derrière le podium, de démonétiser d’avance les résultats des prochaines législatives de l’automne. Car la Russie, disent-ils, "continue de s’immiscer [cybernétiquement] dans notre démocratie. Pire encore, ils manigancent derrière Kim afin de compliquer le processus de détente avec la Corée du Nord." Donc, le Sénat américain vient de déposer une série de mesures visant à sanctionner, une fois encore, l’horrible Russie qui, avec le budget militaire du Royaume-Uni et le produit national de l’Italie, ainsi que le sous-emploi d’un pays sans industrie nationale, représenterait LE danger existentiel de la planète.

Vrai ou faux ? C’est d’une certaine façon vrai, dans la mesure où un grand espace géopolitique et économique euro-sibérien d’abord, puis eurasien ensuite, qui anime la Russie depuis l’ex-Ostpolitik allemande serait une révolution, capable de faire face à tous les défis, autant symétriques (donc géopolitiques) qu’asymétriques (donc spirituels et religieux). C’est, d’ailleurs, la raison pour laquelle Trump veut s’assurer la coopération de Poutine, s’insérant dans le processus « eurasien » en gestation afin de contrer la Chine, cotitulaire, avec l’Europe et les États-Unis, de la médaille d’or de la première puissance économique mondiale, et surtout future première puissance technétronique et militaire mondiale.

Les « exceptionnalistes », à trop mépriser Trump, jouent ainsi contre leur camp. Dans vingt ans, ce sera soit la Chine soit la nouvelle « puissance eurasienne » qui contrôlera l’hémisphère nord.

Cet article a été mis à jour pour la dernière fois le 09/01/2020 à 17:45.
André Archimbaud
André Archimbaud
Consultant stratégique

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